Nous sommes aux Etats-Unis, en 1971. Frank Baughman est un retraité, ancien du FBI, encore habitué à aller s'entraîner au tir une fois par semaine. Les habitudes ont ainsi la vie dure au Texas, et l'homme est kidnappé par d'étranges hommes masqués, en costume. Apparemment, ce n'est pas à Frank que les hommes en question en veulent. Ils ont le vieil homme à disposition, car celui-ci a fait toute sa carrière dans le FBI. Notamment dans ses cinq premières années, où il travaillait directement avec un certain John Edgar Hoover.
Evidemment, l'homme est connu comme le patron charismatique du FBI, qu'il a lui-même créé, et c'est en 1919 que commence le récit de Frank Baughman, à un moment où Hoover était encore un garçon certes droit et intelligent, mais encore timide et bégayant. Un homme qui ne pouvait pas supporter de voir son père dans un état de dépression avancé, un homme qui a commencé par adapter un système de classement dans une bibliothèque, afin d'y retrouver n'importe quel ouvrage en quelques minutes, là où il fallait des heures auparavant.
C'est Palmer, un homme intéressé par la présidence des Etats-Unis, qui a fait confiance en Hoover, sur fond de révolutions communistes incessantes. Hoover hait le communisme et les communistes, notamment une certaine Emma Goldman, qui incite les travailleurs issus de l'immigration à se révolter contre les conditions déplorables dans lesquelles ils doivent travailler pour une misère. Hoover ne peut tout simplement pas supporter cela : il déforme la réalité auprès de Palmer, et veut profiter des vacances du Président pour forcer la main. Il donne les idées, et à Palmer de convaincre le ministère de la Justice. Hoover est prêt à tous les moyens pour cela. Il s'est entouré d'une formidable équipe, et tient maintenant des dossiers confidentiels sur pas mal de monde, après avoir adapté son système de recherche pour classer les individus.
Voila qui fera bien sûr une des grandes forces du FBI : c'est ce que Marc Védrines nous présente dans ce premier tome de La main de Dieu. Le livre est le premier d'une série de quatre, qui nous permettra d'en savoir d'avantage sur l'émergence du directeur emblématique à la forte longévité à la tête du FBI. Le personnage est évidemment éminemment intéressant et complexe, et l'auteur parvient en tout cas à le rendre attachant !
Pour ce faire, la recette est de commencer à s'attarder sur les faiblesses de Hoover : l'homme est brillant, certes, mais il est issu d'un milieu modeste, a honte de l'état de son père, et ne jure que par sa mère (qu'il se doit d'appeler tous les jours).
Védrines parvient à nous plonger dans cette histoire, qui n'est pas sans rappeler, dans le graphisme et dans l'intérêt, une histoire comme Il était une fois en France : le sujet abordé y est bien sûr totalement différent, mais la complexité du personnage principal est un atout commun à ces deux séries. Le trait y est également épuré, offrant une excellente lisibilité aux lecteurs.
Ce premier tome de La main de Dieu constitue une très belle surprise, parfaitement inattendue : à recroiser en tout cas avec J. Edgar, le film où le célèbre directeur est campé à l'écran par le talentueux Leonardo Di Caprio.