Les Chroniques de l'Imaginaire

Bankgreen (Bankgreen - 1) - Di Rollo, Thierry

Bankgreen est une planète à part, rythmée par des cycles différents : l’Eveil et le Sommeil. Durant cette dernière phase, elle se recouvre d’une couche de nève d’une blancheur "immaculée" et baigne dans des clartés tout en nuances de mauve. Mordred, le protagoniste principal, mystérieux et tout de métal vêtu, en est un des derniers varaniers. Monté sur un immense varan, Rod, il participe à la guerre de l’Orman qui doit décider de la maîtrise de l’exploitation de mines.

A l’issue du conflit, il devient le dernier représentant de son espèce. Cet être froid et implacable, côtoyant la Mort comme une proche amie, ne peut rester impassible devant cette solitude. La quête de la signification de son immortalité devient pressante et vitale. La rencontre avec le jeune Niobo, un Shore, va changer le destin des deux "entités".

Le style de Di Rollo est bien présent quel que soit le genre dans lequel il choisit de nous livrer sa prose. L'écriture est envoûtante, la plume très poétique. L'auteur décrit une planète d’une beauté étrange et fascinante, Bankgreen dégage une atmosphère ouatée blanche et mauve, mais rude et dangereuse. En fait, Bankgreen - quasiment le personnage principal de l’oeuvre- semble à la fois fragile et délicate, tout en étant traître et implacable.

Le roman est parsemé de quelques "vignettes" (sur les entités, sur la veuve d’un guerrier, etc.) qui associées au style de l’auteur, forment une série de haïku des plus relevés.

La litanie "Sur Bankgreen tout a une raison" renforce la poésie du texte en le rythmant régulièrement. Elle sert également à justifier l’exploitation des peuples (les mineurs, les rats éborgnés, etc.) par les dirigeants de ce monde-là, et parfois, elle est utilisée jusqu'à l’absurde.

Néanmoins, le thème principal, récurent dans l’oeuvre de Di Rollo, est la mort. Nous l’abordons en compagnie de Mordred. Le varanier parcourt Bankgreen à la recherche d’un sens à son immortalité, suite à la disparition de tous ses compagnons varaniers. Une position d’autant plus paradoxale que Mordred voit la mort "partout" : il connait les circonstances de la mort de chacun des êtres qu'il croise. A l’unisson de ce dernier, le lecteur fait sienne cette quête.

Cependant, à la différence des autres romans de Thierry Di Rollo que j’ai lus, l’univers de Bankgreen n'est pas dénué d’espoir, un espoir certes fragile, mais bien réel.

Bankgreen est un roman de Fantasy d’une profondeur rarement atteinte. Il est écrit avec beaucoup de poésie, et l’auteur nous livre une oeuvre d’une grande beauté. On pourrait éventuellement reprocher que cette association entre un récit poétique et un univers fascinant mette quelque peu l’intrigue au second plan, mais cela serait vraiment chipoter !

Un très bon roman, incontournable pour les amateurs de belle plume et d’originalité.