Le Crépuscule a laissé sa place à l'Hinver, et les bitmites, échappées à leur créateur, ont tout envahi. Dans l'un de ces bastions que sont les Havres, sous la coupe de Ducs qui ne sont autres que des anges (mais qui n'en sont pas forcément...), une troupe de Commedia dell'Arte a repéré sa Colombine.
L'encre est tout. Tout ce qui sous-tend le(s) monde(s). Existe-t-il quelque chose comme la "réalité" ? Ou n'est-elle que le récit que l'on en fait ? Plus encore que dans le tome précédent, en tout cas de façon plus délibérée de la part des personnages, on voit le travail sur le Livre, le travail de Création, le travail du temps à l'oeuvre, en gardant présent à l'esprit qu'il s'agit de temps vécu par une conscience, que celle-ci soit humaine, Amortelle ou angélique.
Le procédé qu'emploie l'auteur de ré-interprétation de chants antiques, et le thème qui fonde le roman, s'enrichissent en se répondant : aucun chant n'est unique et aucune situation n'est nouvelle, puisque tout a déjà été chanté, et pourtant chacun peut influer, mettre sa touche personnelle sur chaque chant et chaque situation.
"Au commencement était le Verbe". Rien d'étonnant à ce qu'il s'agisse ici d'une histoire de création de monde(s). Les personnages s'enchevêtrent, les intrigues aussi, mais l'auteur n'en veille pas moins à donner sinon des clés, au moins des pistes pour les trouver. Si je devais émettre une critique, ce serait quant à l'intérêt de l'épilogue, que j'ai trouvé inutilement long, mais quelque chose a pu m'échapper.
En tout cas, ce second volet inséparable du premier confirme sa qualité globale d'OLNI. Je n'imagine pas de réaction "tiède" à ce diptyque : on aime ou on déteste, on s'y plonge, on s'y perd, on s'y noie, avec délectation, ou on envoie le livre par le balcon le plus proche. Pour qui aime, en tout cas, c'est certainement à relire, à loisir, en travers, à l'endroit et à l'envers.