Les Chroniques de l'Imaginaire

Le réseau Aquila 1/2 (Silas Corey - 1) - Nury, Fabien & Alary, Pierre

Nous sommes en 1917, et la guerre qui ne devait durer que quelques semaines s'est enlisée depuis bien longtemps. Les morts se comptent par millions, pendant que l'industrie de l'armement amasse de véritables fortunes, avec Célestine Zarkoff et ses industries du même nom en tête. Côté politique, Georges Clemenceau, alias Le Tigre, n'est plus au pouvoir, à soixante-seize ans bien tassés. Mais il a un journal en sa possession, L'Homme enchaîné, et compte bien prouver que Joseph Caillaux, la tête du gouvernement, est mouillé jusqu'au cou avec des transactions avec l'Allemagne, carrément !

Et pour cela, il semble qu'un simple timbre, dérobé par un certain Casella pour le compte du Tigre, puisse mettre le feu aux poudres du gouvernement. Mais Casella a disparu, et il est maintenant introuvable. C'est en cela que Clemenceau fait appel à Silas Corey, un homme pour le moins androgyne, que l'on dit excellent détective, mais coureur de jupons invétéré, et très attiré par l'argent.
Corey est un homme assisté de Nam, un homme de main de Cochinchine particulièrement efficace. Corey est aussi et surtout un individu qui travaille également pour le deuxième bureau du colonel Ledoux. Il perçoit donc actuellement un salaire double, jusqu'à ce que sa progression dans l'enquête sur la disparition de Casella lui fasse rencontrer la vieille Zarkoff en personne, qui lui propose un troisième salaire en échange du timbre de Casella, et de la mise en silence de ce dernier.

Dans cette enquête, Corey est désormais l'homme qui possède le plus de cartes en mains. D'autant que l'homme est intelligent, et magnifiquement secondé par Nam, qui parvient à déterminer qui est Aquila, l'homme qui a écrit la carte postale qui portait le fameux timbre. L'homme qui a décimé un grand nombre de soldats français dans les tranchées, en leur faisant parvenir du pain avarié par de simples vers.

Fabien Nury s'est associé là à Pierre Alary (dessinateur de Belladone, Sinbad et autres chez Soleil). Nury présente ici un héros aux mœurs douteuses et aux méthodes plus que discutables. Un héros qui n'est évidemment pas sans rappeler un certain Joseph Joanovici dans Il était une fois en France, une autre série absolument indispensable de Fabien Nury et Sylvain Vallée.

Dans le premier tome de ce qui sera un diptyque, les choses font plus que simplement se mettre en place. La présentation des personnages est rapide et intelligemment faite, et de nombreux évènements émaillent déjà ce premier opus. On retrouve en cela la patte du scénariste, qui va beaucoup plus vite à l'essentiel, étant donné qu'il n'aura peut-être pas six tomes pour développer tout cela.
Mais qu'à cela ne tienne : le récit est encore une fois très prenant, parfaitement maîtrisé, et les rebondissements sont déjà présents. Le dessin de Pierre Alary s'associe parfaitement en tous points avec le scénario : on retrouve un trait fin, vif et nerveux, qui correspond parfaitement aux scènes de poursuites et d'action imaginées par Nury.

Un premier tome bien plus que convaincant, même si Nury nous avait habitué à des histoires qui s'étalent sur plus de deux volumes. Il nous tarde déjà de découvrir la suite, prévue heureusement pour mars !