Les Chroniques de l'Imaginaire

L'autre côté (Vito - 1) - Stalner, Éric

Nous sommes en 1947, en Sicile. Giuseppe Amarino est un projectionniste itinérant. Il va de ville en ville afin de diffuser ses films, dans les endroits les plus reculés de Sicile, où aucun cinéma n'est encore présent. King Kong, La Belle et la Bête... Autant de films qui font partie des bobines de Giuseppe. Ce soir, c'est dans le village de Baltisi que Giuseppe fait sa projection. Il va encore y rencontrer la jolie Carlotta, et comme d'habitude, il ne pourra que bredouiller des paroles sans intérêt.

Mais ce soir là, un autre évènement a lieu : un vieil homme lui remet une vieille bobine qui aurait été tournée en 1929. Une bobine d'un petit film sans son, qui ne dure qu'une dizaine de minutes. Giuseppe prend le vieil homme pour un fou, mais emmène tout de même le dit film. Un peu plus tard, la tentation est trop forte : Giuseppe assiste à la première projection de ce petit film, en compagnie de Barto, son chien... Et le choc est grand : on voit dans le film une petite fille qui est poursuivie par un gentil centaure, hallucinant de réalisme. Les effets spéciaux en 1929 étaient loin d'atteindre cette qualité, d'autant qu'un faune lui aussi très réaliste fait une brève apparition.

Ce petit film finit par faire le tour des petits villages de Sicile. Il attire de plus en plus de monde, qui vient pour voir le film de la soirée, et ce petit film étrange en guise de clôture. De quoi attirer le jeune Vito, qui ne tarde pas à devenir une aide manuelle pour Giuseppe. Vito a tenté de dérober le film, et a fait l'objet d'une poursuite par sa demi-sœur. L'étrange garçon ne sait pas lire, ce qui est étonnant vu son intelligence. Il dit avoir été maintenu enfermé longtemps par son grand-père, l'aïeul d'une des familles les plus importantes de Sicile.

Par ailleurs, le jeune garçon cache un terrible secret que seul Barto a pu remarquer. Vito est un personnage étrange, envoûtant, comme Eric Stalner est capable d'en faire ! Ce premier tome de Vito est une petite merveille. Sur le plan du scénario et du récit, Stalner parvient à effectuer une présentation rapide de ses personnages, et permet au lecteur de les cerner rapidement, tout en leur donnant une belle profondeur.

Les histoires de famille sont légion en Sicile, et Stalner parvient à faire ressortir cela à merveille. Les décors et les couleurs sont magnifiques et entraînent à l'évasion, tandis que les personnages et leurs expressions sont également très réussis. Graphiquement, dans les décors et les couleurs utilisées, le livre n'est pas sans rappeler Ange-Marie, un one-shot du même dessinateur sorti en 2005 dans la prestigieuse collection Aire Libre de Dupuis.
Le livre est également très réussi dans sa forme, avec une couverture sur fond mat très réussie, même si elle en dit peut-être un peu trop sur le secret de Vito. Nous naviguons là à la frontière entre la réalité et la fantasy, et cela est bien agréable avec ce premier tome d'une nouvelle série d'Eric Stalner. Vivement la suite, surtout si elle atteint encore ce niveau de qualité !