Il est compliqué d'être heureux. De nombreux facteurs peuvent jouer en notre défaveur : l'éducation, l'histoire familiale, l'environnement de vie, les problèmes sentimentaux, professionnels, les soucis avec la famille, les amis, les enfants... Mais on a tendance à oublier que notre plus féroce ennemi, celui qui nous empêche le plus souvent d'atteindre la sérénité, n'est autre que nous-même.
Kristin Neff s'emploie à transformer cet état de fait. Pour elle, il est clair que si l'on veut être heureux, il faut que l'on apprenne à écouter notre souffrance et à éprouver de l'empathie pour nous-mêmes. L'auto-compassion est son domaine de recherche ; elle la pratique et l'enseigne. Ce principe, assez peu connu en France, repose sur trois composantes de base : apprendre à écouter et à accepter sa souffrance plutôt que d'essayer de la combattre ou de l'étouffer ; ne pas se focaliser sur sa spécificité, la remettre dans un contexte d'universalité en se rappelant qu'elle est le lot commun de tous les êtres humains à un moment ou un autre de leur existence ; et enfin, pour la dépasser, s'accorder à soi-même la compassion que l'on attendrait d'un ami cher.
Ces trois idées principales, simplistes en apparence, méritent d'être développées tant elles vont à l'encontre de nos idées reçues et fonctionnements habituels, qui tantôt survalorisent la critique et l'autocritique, tantôt portent aux nues l'estime de soi.
Car contrairement aux apparences, ce concept d'auto-compassion est à mille lieues du principe de "pensée positive". Il ne s'agit pas de se convaincre à tout propos et en toute circonstance que tout va pour le mieux ni que l'on est un être merveilleux dénué de défauts. Il est plutôt question ici d'acceptation. Accepter les bons et les mauvais côtés de nous-mêmes, des autres et de la vie en général, sans jugement.
J'étais au départ sceptique face à ce message général, car je suis assez peu adepte de ce genre de théorie "bisounours". Mais l'exposé de Kristin Neff m'a totalement convaincue. A la moitié du livre, je me suis rendue compte que je n'avais pas sorti le nez des pages depuis plusieurs heures. Ce livre très humain, plein d'intelligence et de compassion, m'avait totalement absorbée.
Découpé en chapitres explorant l'utilité de l'auto-compassion vis à vis de nos parents, de nos enfants, de nos amis, de nos conjoints ou dans le milieu professionnel, S'aimer propose également bon nombre d'exercices pour introduire cette manière de penser dans notre existence. A mon sens, le message général se suffisait à lui-même, et ces propositions concrètes de mise en pratique dénaturent un peu le propos en ce qu'ils peuvent frôler le ridicule (si je dois être honnête, se prendre soi-même dans ses bras lors d'une crise de larmes me semble un peu... pathétique).
Mais c'est bien le seul reproche que j'adresserai à ce livre, par ailleurs bien ancré dans la réalité et illustré de nombreux exemples vécus, notamment par l'auteur, son entourage ou ses étudiants.
Ce livre de développement personnel m'a surprise par son intelligence, sa bienveillance, et surtout son utilité. Je le conseille sans hésiter à toutes les personnes cherchant à mettre un frein à leur mal-être général.