Les Chroniques de l'Imaginaire

Alibis (Alibis - 45)

Comme toujours, ce numéro d'Alibis propose cinq nouvelles, suivies de deux articles et, grande nouveauté, la rubrique Camera oscura, qui, jusqu'à présent, n'existait que dans la version numérique de la revue, à savoir sur le site www.revue-alibis.com.
J'apprécie beaucoup cette revue, pour son sérieux, sa rigueur, le respect qu'elle montre envers ses lecteurs et ses auteurs. En effet, à la fin de chaque nouvelle, un petit paragraphe et une photo de l'auteur nous permettent de mieux le connaitre.
Dans les articles, des photos en noir et blanc (couvertures de livres, affiches de films, portraits..) illustrent toujours agréablement les propos.

Les nouvelles sont de bonne facture, notamment les deux premières qui, à elles deux, justifient amplement l'acquisition de ce numéro.

Cinq compagnes pour la cigale : hommage au giallo de Ariane Gélinas
Quatre jeunes mannequins et une photographe fôlatrent dans un champ de blé pour des photos. Mathieu, le fils un peu benêt des fermiers ayant loué leur champ les épie.
Une première jeune femme est violemment assassinée, puis une seconde, puis la troisième... Les meurtres sont tous différents mais très crus et imagés. Comme le veut le giallo (forme particulière de narration) on ne connait pas l'assassin avant la toute fin. Et on ne s'y attend pas !
C'est cru, sanglant, magnifiquement écrit, surprenant. Une très bonne histoire qui mérite vraiment le détour.

Ce qu'a fait Kelly de Catherine Astolfo
Kelly est mis en joue par des policiers : il (oui, Kelly est un garçon) a un fusil dans ses mains, du sang sur lui, et ses parents sont morts. La police essaie de le maîtriser. Pour le calmer, elle fait appel à son ancienne institutrice qui va raconter ses souvenirs avec ce jeune garçon vivant une enfance bien particulière.
Une très belle histoire, qui a reçu en 2012 le prix Arthur-Ellis Award, et c'est largement mérité.

Les trois autres nouvelles sont moins remarquables, mais ont chacune leurs atouts.

Le 27, impair et manque de Luc Baranger
Le narrateur raconte l'arrivée de nouveaux voisins, qui deviennent des amis. Leur couple se met à battre de l'aile. Et cela se termine par un meurtre.
Rien d'original, mais agréable à lire tout de même.

Comme on se retrouve de Geneviève Blouin
Marie est agent du SCRS et doit rapatrier Karfi Ben Nadr, un ennemi qui a organisé une vingtaine d'attentats-suicides. Après l'avoir enfin capturé, sur la route du retour, elle se retrouve confrontée à une de ses connaissances, Sean, agent d'une autre organisation.
Nouvelle fortement plongée dans une atmosphère de guérilla, de désert, de violence, d'armes, et de militaires. Pas ma tasse de thé, mais pour ceux qui aiment cette ambiance, c'est très sympa à lire.

Le ring des magouilles de Maxime Houde
Un combat de boxe, le vainqueur retrouvé mort, le match truqué...tous les ingrédients sont réunis pour une bonne histoire virile efficace.

L'article L'année 2012 du polar québécois de André Jacques reprend tous les événements de 2012, parutions, prix littéraires, salons, festivals. Intéressant et instructif (saviez-vous que le prix Arthur-Ellis était nommé ainsi en l'honneur du dernier bourreau ayant officié au Canada ?).

Conversation avec David S.Khara : Pascale Raud discute à bâtons rompus avec cet écrivain français en visite au Québec. Leurs échanges sont très agréables à lire, rythmés, intéressants, et traitent naturellement des écrits de l'écrivain, de sa série des Projets, (Le Projet Bleiberg, Le projet Shiro, et prévu pour 2013, Le projet Morgenstern)
Je ne connaissais pas du tout cette série, mais l'interview passionnée de son auteur me donne bien envie de la découvrir !

Camera Oscura de Christian Sauvé
Avec quelle prose et quel talent Christian Sauvé critique les films sélectionnés pour illustrer ses propos sur le cinéma ! Bien que je ne sois pas une cinéphile avertie, j'ai adoré lire sa rubrique juste pour le plaisir de lire une belle écriture. C'est amusant de retrouver au milieu des nombreuses oeuvres citées un film qu'on vient récemment de voir à la télévision sur une chaîne payante.

Dans les dernières pages, Le crime en vitrine liste, sans critique ni avis, les dernières parutions de romans policiers, tandis que Dans la ligne de mire va s'attarder sur d'autres, en donnant un avis pertinent, et parfois amusant.