Cela fait près de dix ans que les Achaens sont devant Troie, et la lassitude s'installe ainsi que les dissensions. Ainsi le plus grand guerrier parmi eux, Achille, fils d'une déesse, est-il vexé par le Chef suprême, l'Atride, Agamemnon, et se retire-t-il du conflit, partant bouder sous sa tente. En son absence, les combats se poursuivent, mais le sort de la bataille penche plutôt du côté des Troyens qui, menés par Hector, fils du roi Priam, s'approchent fort près des "bateaux creux" grâce auxquels les Achaens sont venus, et qui sont leur seul moyen de retour. La situation se complique du fait que les dieux sont partagés quant à l'issue du conflit, et soutiennent l'un ou l'autre camp, sans se priver aucunement d'y intervenir.
Cette nouvelle traduction, dépoussiérée, très moderne, donne bien à imaginer ces guerriers fort peu sophistiqués d'une civilisation qui n'avait pas encore inventé la chevalerie : il n'y a aucune honte à avoir peur, ou à fuir si on se sent en infériorité, ni à être frappé dans le dos, et le traitement que réserve Achille à Hector mort hérisse le poil du lecteur moderne. L'Iliade est un poème guerrier, débordant d'hémoglobine, où la description des blessures est aussi criante de réalisme que variée. Homère chante autant l'amour (d'Hector et son épouse, Andromaque, par exemple, mais aussi d'Achille pour Patrocle, ou de Priam et d'Hécube pour leur fils mort) que la douleur, que la beauté de l'aurore, que la trahison des dieux, et leurs diverses interventions. La langue du poète est toujours inventive, et c'est un vrai plaisir que de le lire ou de le relire.
Outre le plaisir de cette nouvelle traduction, on découvrira un corpus de notes parfait, ni trop ni trop peu abondant. En revanche il est dommage que la reprise en postface d'un texte ancien de Pierre Vidal Naquet ne mentionne évidemment pas la théorie la plus récente quant à la localisation de la cité (légendaire ?) de Troie.