Il est des histoires qui vous emportent en quelques mots. Certaines ne font que quelques pages, certaines sont un peu plus longues. Il est des auteurs qui savent vous toucher, et ce depuis longtemps. Il y a des auteurs qui, en vingt-cinq nouvelles, vous font apprécier un peu plus un auteur que vous aimiez déjà enfant, et vous redonnent un peu confiance dans l'Homme.
J'ai découvert Bradbury en cinquième avec Les chroniques martiennes et il n'a jamais quitté le cur du petit enfant que je suis resté. Il est pour moi synonyme de découverte, découverte d'un monde impitoyable où les livres doivent être brûlés, où le divertissement prime sur la connaissance, découverte aussi de la couardise des hommes. Il fait partie des quelques auteurs incontournables de la science-fiction dont les nouvelles et romans ont influencé un pan complet de la littérature SF moderne.
Il serait trop long de résumer la totalité de ces vingt-cinq nouvelles, mais ce que je peux dire c'est qu'elles parlent de gens isolés dans une maison sur une île lointaine, qu'elles parlent d'espace et de comètes, d'absence et de manque, de promesses non tenues qui tournent en mensonges, d'une histoire d'amour à cause d'un adorable chaton trouvé par hasard. Elles parlent d'uchronies et de voyages dans le temps pour sauver son auteur préféré. Elles parlent surtout d'une humanité avec ses failles mais aussi ses forces. Elles parlent de l'obligation de s'ouvrir aux autres et de ne pas avoir peur de leurs différences. Elles dénotent surtout une certaine nostalgie d'un homme en fin de vie qui se tourne pour voir ce qu'il a fait, pensé, dit.
Léviathan 99 est constitué de nouvelles publiées entre 1946 et 2003. Cette édition fait écho à la mort de Bradbury qui nous a quittés bien trop tôt. Pour l'amateur de SF que je suis, ce fut un choc alors ce fut un vrai plaisir de me plonger dans ce recueil. Après la première nouvelle j'ai perdu l'écrivain que j'aimais tant et j'ai trouvé l'homme derrière l'écrivain. S'il y a bien une constante dans ce livre, c'est l'humanité qui s'en dégage. Il y règne un spleen, une douce mélancolie qui donne un cachet particulier à ce livre. J'ai aimé ce recueil aussi parce qu'il me permettait de revoir une dernière fois mon auteur préféré, une jolie façon de dire au revoir à l'homme qui m'a fait rêver et à me révolter, en tout cas de ne pas laisser faire l'injustice.
Bradbury fait partie avec Matheson des deux auteurs qui m'ont fait frissonner dans l'horreur, rêver ou m'indigner dans la SF et me montrer à quel point l'humanité peut être belle dans le récit plus « classique ». Alors oui je pourrais me plaindre de cette réédition d'un recueil paru il y a seulement trois ans. Mais quand le talent et la sincérité d'un auteur, d'un homme sont là, il n'y rien a dire, il ne faut qu'apprécier.
Bref un recueil incontournable pour tout amateur de Bradbury et un recueil à avoir dans sa bibliothèque pour tout amateur de littérature.