Les Chroniques de l'Imaginaire

Les Chaînes du Dragon (Hurog - 1) - Briggs, Patricia

Hurog, le refuge des dragons, dépérit depuis de nombreuses années. Les dragons qui lui ont donné son nom se sont envolés voilà fort longtemps, les cultures ne donnent plus, les richesses ont disparu, bref cette petite seigneurie montagnarde vivotante n’a plus grand intérêt si ce n’est le prestige encore attaché à son nom. Le sang des Hurog lui-même semble s’être affaibli, à moins qu’il ne s’agisse de la malédiction que l’on dit attachée à la famille : des trois enfants du cruel seigneur Fenwig, l’aîné Stolon est resté attardé suite à une correction trop violente, le cadet Tosten est suicidaire et la dernière Ciarra est muette.

Les apparences sont trompeuses, cependant. Stolon attend son heure, se faisant passer pour plus bête qu’il n’est pour échapper à la jalousie de Fenwig, qui veut rester seul maître d’Hurog. Il entend révéler son stratagème une fois son père mort, quand il sera temps pour lui d’hériter du titre d’Hurogmestre. Hélas pour lui, les événements vont rapidement devenir incontrôlables, il va lui-même prendre quelques décisions malavisées, et le voilà bientôt contraint de fuir en compagnie d’une poignée de fidèles. Pourra-t-il récupérer son domaine un jour ?

Ce livre est pour moi un énorme coup de cœur. Je l’ai découvert à sa sortie en France en 2008 et n’ai pas pu le lâcher. A chaque relecture, cela me fait le même effet : je dévore tout d’une traite. J’ai depuis découvert les autres ouvrages de Patricia Briggs (y compris la suite de ce roman, que j’attendais impatiemment), que j’aime énormément également, mais celui-ci reste mon préféré. Honnêtement, je ne sais pas vraiment pourquoi car, si l’écriture est agréable, le scénario ne brille pas par son originalité : il n’empêche que pour moi le résultat est excellent.

Le personnage principal, Stolon, est très sympathique. Il est d’autant plus facile de s’attacher à lui qu’il raconte son histoire à la première personne et au présent, on peut donc suivre ses pensées et doutes. Il est malin, mais pas à l’abri d’erreurs ; il a quelques pouvoirs de mage, mais très limités. Par contre, c’est un véritable caméléon, capable de jouer au benêt aussi bien que d’incarner l’antique héros de Hurog, Seleg. Au point que lui-même ne sait plus vraiment qui il est !
Les personnages secondaires se révèlent également plus intéressants qu’ils ne peuvent le sembler de prime abord, car rarement manichéens : Oreg et son âme torturée, Axiel dont la présence de longue date comme ordonnance auprès des seigneurs d’Hurog n’est pas si innocente, Tosten qui doute souvent de son frère… Les relations des personnages entre eux sont particulièrement bien décrites et apportent une dimension supplémentaire.

L’intrigue mêle magie, histoire, guerre et complots, courage et trahison, beaucoup de sentiments, cela de manière intelligente mais parfois un peu facile. Le scénario réserve quelques surprises, et une fin ouverte qui appelle une suite.
L’écriture n’est pas très recherchée, mais les phrases courtes et fluides sonnent justes et c’est très facile à lire. C’est frais, c’est distrayant, et j’ai eu grand plaisir à relire ce roman encore une fois.
Mon seul regret concerne la couverture passe-partout choisie par Milady, à laquelle je préfère la couverture sobre mais frappante qui illustrait la précédente édition chez L’Atalante.