Le chemin des ombres - Noirez, Jérôme

Le village de Nichu occupe le fond d’une vallée. Il ne possède pour seule enceinte qu’une immense corde de paille de riz torsadée où sont suspendues des plaquettes de bois qui s’entrechoquent lors de vent fort. Elle n’arrête que les êtres qui hantent la forêt. Les récoltes de riz sont généreuses, les forêts giboyeuses, la production de soie est réputée dans toute la province, les montagnes riches en métaux que les villageois forgent en miroirs de grande qualité.

Cette prospérité attire la convoitise de la reine Himiko qui règne sur toute la province de Kinaï. Elle désire annexer à son royaume les communautés de Kii dont Nichu fait partie.

Depuis la mort de sa mère Izanami et la disparition de son père Izanagi, Amaterasu, leur fille, veille sur la communauté de Nichu en tant qu'uji-no-kami (chef politique et religieux). En tant qu’esprit vivant, l’adolescente reçoit l’émissaire de la reine Himiko, mais elle éconduit sa proposition de rejoindre le royaume d’Himiko. Ce refus va engendrer des conséquences qu’Amaterasu ne soupçonne pas encore. Cette entrevue a toutefois ravivé des souvenirs douloureux pour la jeune fille.

Son frère Susanowo a été banni pour un an par les gens de Nichu lorsqu'il en avait douze pour un acte qu’il considérait comme une broutille. Après l’année écoulée, Susanowo a refusé de revenir au village et il ne pardonne pas à sa sœur d’avoir pris sa place, d’avoir succédé à leur père. Il lui voue une haine féroce. Des pulsions meurtrières l’envahissent souvent. Il n’est que colère et les villageois le considèrent comme fou.

Susanowo est hanté de cauchemars. Une nuit, il rêve de sa mère et sa terrible injonction résonne encore dans son esprit à son réveil : elle désire être entourée de ses enfants. Susanowo kidnappe Amaterasu. Il force sa sœur à emprunter le chemin que leur père avait pris huit ans plus tôt, celui qui mène au Yomi, le monde des morts, dont Izanami leur mère est devenue la souveraine. Un voyage qui n’est pas sans danger pour les deux adolescents, d’autant que l’absence d’Amaterasu perturbe les villageois qui se retrouvent sans guide pour affronter l’armée d’Himiko qui se massera bientôt aux portes du village.

Jérôme Noirez revisite le Kojiki, les chroniques des faits anciens de la mythologie japonaise, pour offrir à ses lecteurs un récit où faits historiques et légendes s’entremêlent dans un monde fantastique digne de la tradition shinto. Un conte merveilleux qui reflète toute la cruauté et la beauté du Japon médiéval.

L’auteur démontre sa faculté à surprendre tant ses univers sont différents les uns des autres. Il a cette aptitude peu commune de savoir emporter son lecteur bien au-delà de son propre imaginaire. Un écrivain aux multiples facettes et au talent incomparable.