Hannibal, en Italie, c'est le furet "Il est passé par ici, il repassera par là..." : quasiment toutes les régions de la péninsule ont leur pont d'Hannibal, et autres villages nommés Barca, sans compter bien entendu celles où ont eu lieu les grandes batailles qui l'ont opposé aux Romains, au grand dam de ces derniers, d'ailleurs.
Fasciné par la figure de ce conquérant quasiment disparu de l'enseignement de l'Histoire en Italie, Paolo Rumiz décide de se lancer sur ses traces, en refaisant le périple du général carthaginois. Depuis Carthagène, en Espagne (la Carthago Nova fondée par le père d'Hannibal, précisément), il traversera les Pyrénées, le Languedoc, les Alpes, se perdra entre la Stura et le Pô, puis atteindra la Campanie et le sud de la péninsule, où le général victorieux s'est attardé pendant treize ans. De là, il sera rappelé à Carthage, où son ennemi romain, Scipion l'Africain, fait des ravages, subira une défaite à Zama, et quittera pour toujours son pays avant de fonder une ville au pied du mont Ararat et d'aller s'empoisonner sur les bords de la mer de Marmara - dans la Turquie actuelle - pour éviter d'être livré aux Romains.
Paolo Rumiz part à sa recherche sans perdre de vue l'Italie, en essayant de percevoir les points de divergence entre présent et passé. Il évoque de façon très imagée les deux mille cinq ans écoulés depuis ce qu'il raconte : en somme, dit-il, il suffit de trente six grands-pères ! La langue est somptueuse, lyrique et précise, servie par une traduction qui ne doit pas avoir été si facile. Les personnes que rencontre le journaliste sur son parcours, tous fervents du Carthaginois, sont hauts en couleurs, et de véritables puits de science qui savent la rendre vivante et actuelle.
En somme, que ce livre ait eu le Prix de l'essai de L'Expres en 2012 n'a rien d'étonnant : il dépoussière l'Histoire !
