Marie Adélaïde Lenormand est une cartomancienne réputée. Ayant prédit la mort de personnages connus, elle se retrouve liée à une série de meurtres barbares et dérangeants par le biais de ses visions qui interviennent n'importe quand. Lorsqu'elle se rend sur l'une des scènes de crime, elle y rencontre Joseph Fouché qui enquête lui-même sur ces meurtres. Mais ce que la sibylle refuse d'avouer, c'est qu'elle découvre très vite qu'un homme est lié à ces meurtres troublants. Pendant ce temps-là, Louis de Sade, alias le marquis de Sade, est embauché par trois étranges jeunes femmes pour leur composer un opéra digne de ses meilleurs écrits. L'homme est étonné que des femmes d'aussi bonne condition souhaitent qu'il leur écrive un opéra sous le signe de la décadence. Commence pour le marquis l'écriture d'un opéra qui changera sa vision des choses.
La Sibylle et le marquis est en fait le troisième tome d'une saga mettant en scène la cartomancienne. Cependant, il n'est pas nécessaire d'avoir lu les deux premiers opus de ses aventures, comme ce fut le cas pour moi, pour apprécier ce roman à sa juste valeur. Nicolas Bouchard nous fait très vite découvrir l'univers de cette fin de dix-huitième siècle à l'époque où Bonaparte n'était pas encore l'Empereur de France. Son style est vraiment plaisant et rend la lecture incroyablement vive et rapide, tant le roman est addictif. Attention cependant, pour les âmes sensibles, ce roman est très porté sur l'érotisme et le pornographique avec quelques détails gores et qui pourraient écurer certains lecteurs. (Je pense par exemple à ceux qui ne peuvent supporter les écrits du marquis de Sade, très détaillés).
La Sibylle et le marquis permet de mettre en avant un auteur très controversé et connu pour ses écrits malsain et scabreux : le marquis de Sade, à qui on doit par exemple Les infortunes de la vertu ou encore Les cent vingt jours de Sodome. Moi qui ai apprécié ces lectures, j'étais ravie de voir que Nicolas Bouchard nous offre un marquis plus vrai que nature et qu'il ait pris le parti de l'imiter d'une certaine manière dans la façon d'écrire les scènes torrides. L'héroïne Marie Adélaïde est d'ailleurs relayée au second plan pour faire du marquis le véritable héros de ce roman, car la plupart du temps, l'auteur nous propose de suivre les aventures de ce dernier avec l'écriture de cet opéra étrange et pornographique. Sade est d'ailleurs un personnage détestable qui n'a honte de rien et qui est décrit de manière à le rendre antipathique. Obèse et moins obsédé depuis un épisode de sa vie, l'auteur en fait un héros malgré lui qui sera la raison d'un véritable massacre.
Moi qui m'attendais davantage à une enquête suite aux différents meurtres, j'ai légèrement été déçue que cette partie de l'intrigue ne soit pas plus exploitée que ça, l'auteur ayant décidé de s'amuser avec le marquis pour exploiter toutes les facettes de sa personnalité et de ses goûts, même si au fond il est devenu un personnage presque sage ! Marie Adélaïde s'occupe de comprendre ses visions et de découvrir le lien entre Sade et les meurtres de plus en plus barbares (et à la limite du soutenable parfois) tandis que le marquis en est clairement la cible. J'ai aimé d'ailleurs la rencontre presque fortuite entre ces deux fortes têtes qui n'ont pas la même vision des choses et qui pourtant finissent par s'allier.
Je suis passée par un tas d'émotions face à cette découverte livresque et lorsque j'eus fini le roman, j'en redemandais. Nicolas Bouchard réussit le pari de faire revivre ce personnage atypique et détesté et de nous proposer une intrigue qui tient la route. Nul doute que le manuscrit des Cent vingt jours de Sodome n'a pas fini de faire parler de lui ! Roman à conseiller aux adultes et âmes non sensibles pour le caractère obscène de certains passages, mais un roman à ne point bouder !