Alors que le Comité central du PCE (Parti Communiste Espagnol) commence à peine à siéger, il y a une courte panne de courant. Quand les lumières se rallument, le secrétaire, Fernando Garrido, est mort, assassiné. Enorme scandale, évidemment ! Et au-delà de cela, dans ces années qui suivent de près la mort de Franco et le rétablissement de la démocratie en Espagne après des années de dictature - et de clandestinité, et de répression parfois féroce, pour les militants du Parti - cette mort est à la fois une occasion et un danger pour beaucoup de monde. De surcroît, l'enquête est confiée au commissaire Fonseca, de sinistre mémoire du fait qu'il a été un serviteur zélé de la police au temps de Franco.
Du coup, le secrétaire par intérim, ami de longue date du mort, va demander à Pepe Carvalho de mener l'enquête. Celui-ci a maintes raisons de refuser : d'abord, il ne sait pas où bien manger à Madrid, et ensuite il connaît trop de gens au Parti, dont certains ont participé à son exclusion. Il finit néanmoins par accepter, et part pour Madrid. Dès qu'il prend connaissance des éléments, il exclut que le crime ait été commis par quelqu'un d'extérieur au Parti, et même d'extérieur au Comité central. Etant donné les circonstances, il retient vingt coupables possibles, parmi lesquels une demi-douzaine probables. Cela ne semble pas faire l'affaire de tout le monde, c'est le moins qu'on puisse dire...
L'enquête policière n'est pas le principal attrait de ce roman, même si elle est bien racontée. On y retrouve, bien sûr, le style habituel de la série des aventures du "privé gastronome", mais elle est aussi entrelardée de longues tirades dans le langage si particulier des communistes, écrites entre nostalgie et ironie, me semble-t-il, et dont je pense qu'il faut avoir connu cette époque-là, fût-ce dans un pays différent, pour les reconnaître réellement - voire les comprendre, tout court !
Les personnages sont croqués d'une plume alerte, parfois féroce (Leveder, Cerdàn, Fonseca), parfois tendre (Santos Pacheco), même si la tendresse est toujours mêlée d'ironie.
En somme, une histoire intéressante et bien écrite, mais que je déconseillerais personnellement aux moins de quarante ans.