Les Chroniques de l'Imaginaire

Pawnee - Prugne, Patrick

Sept années se sont écoulées depuis les événements relatés dans Frenchman. Nous sommes en 1811 et des colons vivent maintenant dans des fermes, dans l'Ouest américain. Les indiens, eux, sont en train de se regrouper par tribus : certains n'hésitent pas à massacrer des familles entières de colons blancs, et à mettre le feu à leurs fermes. C'est dans ce contexte que l'on assiste à l'arrivée d'Angèle aux alentours de Philadelphie. La jeune femme est là dans le but de retrouver son frère, Alban, et son ex-compagnon, Louis, dont elle a perdu la trace bien plus à l'Ouest, il y a bien des mois maintenant...

Ainsi, en se faisant passer pour une comtesse, Angèle parvient à trouver des hommes qui acceptent de l'amener à l'Ouest, malgré les indiens qui menacent maintenant de plus en plus ouvertement. Les pawnees ne sont, eux, pas encore entrés en guerre en compagnie des autres tribus et de leurs ennemis sioux, mais l'heure est à la réflexion dans les conseils de vieux sages pawnees.

Toujours est-il que nous n'avons toujours aucune trace de Louis, dont on sait qu'il a dû épouser une squaw pawnee, lorsque le mari de cette dernière a été lâchement assassiné par deux hommes blancs, des brutes épaisses, qui accompagnaient Louis à l'époque. C'est plutôt Alban qui s'en tire maintenant plutôt bien : l'homme a fait un énorme plongeon pour échapper à des indiens à sa poursuite, et il est recueilli par un groupe de cinq miliciens du Kentucky. Des hommes très durs qui se rendent à Prophet's town, où les tribus indiennes ne vont pas tarder.

Le voyage se poursuit bon an mal an, et Alban se rend bien compte que ces miliciens-là ont des choses à cacher. Rapidement, il apprend que ses compagnons de route ont eu à massacrer des indiens, par familles entières, notamment chez les pawnees qui ne sont pourtant pas en guerre. Alban a lui aussi intérêt à garder profil bas, car il est toujours recherché pour un meurtre qu'il a commis sur un américain, sept ans plus tôt.
Et la somme qu'il vaut maintenant attire bien l'homme qui a accepté de conduire Angèle vers l'Ouest... Et le groupe de miliciens, de son côté, est mystérieusement pris en charge par un guerrier indien qui joue avec leurs nerfs, les éliminant un par un dans une impitoyable chasse...

Après Frenchman, c'est ce Pawnee qui fait de nouveau mouche dans les réalisations de Patrick Prugne pour le compte des éditions Daniel Maghen. Encore une fois, on se prend à voyager dans l'Ouest sauvage, suivant l'évolution de deux groupes de voyageurs, entre Alban et les miliciens d'un côté, qui remontent vers le Nord, et Angèle et ses compagnons qui vont vers l'Ouest, pour fatalement finir par se croiser.

Depuis Frenchman, les personnages ont évolué : les voyages dans la nature américaine les a transformés, leur a fait gagner en maturité. L'époque est impitoyable pour les faibles, et il est complexe de pouvoir accorder sa confiance en l'homme. Prugne l'a bien saisi et nous le raconte une nouvelle fois avec un brio certain. Le dessinateur peintre possède désormais des scénarios qui font parfaitement mouche, après avoir travaillé avec un certain Tiburce Oger. Ainsi, nous sommes toujours à la lisière entre le voyage, la poésie, mais aussi le western le plus violent par moment.

Et encore une fois, ce sont les dessins et les couleurs qui nous émerveillent dans ce Pawnee. La couverture, toute en luxuriance, est parfaitement réussie, et il faut bien se rendre compte que toutes les planches en sont parfaitement dignes. On croise même dans le livre quelques paysages en double pages du plus bel effet, sans parler des dessins supplémentaires dans le carnet qu'il nous est donné d'admirer.
Les visages, les costumes, les expressions, les cadrages, le mouvement : tout est tout simplement parfait dans ce livre. L'utilisation des animaux également, avec des corbeaux qui renforcent le côté glauque et dramatique de certaines scènes, ou des chevaux qu'on a presque l'impression de voir bouger.

Pawnee, tout comme Frenchman, est un livre à découvrir et à posséder tout naturellement. Il pourra être lu et relu de nombreuses fois, tant les détails et les heures de recherches ont été encore une fois primordiales ici. Daniel Maghen est un éditeur (et également une galerie sur Paris) qui ne fait pas dans la quantité, on l'aura compris, mais bel et bien dans une immense qualité.