Edgar Rice Burroughs est l'auteur de la très célèbre et remarquable série des Tarzan. Mais il a également été un écrivain prolifique de science-fiction, avec son héros légendaire, John Carter.
Bien sûr, il ne faut pas perdre de vue que cela a été écrit dans les années 30 donc avec une technologie encore bien vacillante, mais avec parfois de belles idées visionnaires, comme par exemple la notion de téléphonie sans fil ou le clonage.
D'une écriture parfois un peu vieillotte, ces romans de SF ont un charme suranné qui peut à la longue lasser le lecteur plus habitué à une SF moderne, bourrée de technologie et d'action. Par exemple, on ne se bat pas à coup d'armes super-giga-électroniques, non, on se bat à l'épée, on ne parle que de bretteurs, de taille et d'estoc, comme dans un bon vieux roman de cape et d'épée, mais qui se passe sur Mars.
Mais on peut aussi se laisser charmer par cette ambiance de vieux films maladroitement colorisés mais si envoûtants, et cela a été mon cas. Plus j'avançais dans ma lecture, plus j'étais conquise par cette atmosphère particulière et plus j'appréciais ma lecture.
Lorsque j'ai commencé le premier roman, j'étais sceptique et pensais que j'allais avoir du mal à lire cinq romans de ce style d'affilée. Mais rapidement mon opinion a changé et je me suis trouvée sous le charme de l'écriture de Burroughs, et j'ai enchainé les cinq romans sans m'arrêter, avec un plaisir croissant.
C'est également très instructif et édifiant de lire comment nos ancêtres du siècle dernier pouvaient imaginer le futur.
Ces romans sont relativement courts et se lisent facilement.
A déplorer toutefois la qualité typographique plus que médiocre. Pratiquement rien à reprocher dans le premier roman, mais plus on avance dans le tome, plus les fautes sont nombreuses : répétitions de mots, absences de mot, coquilles, orthographe, grammaire, conjugaison (un "je leur expliqué" absolument impardonnable), tout y passe. A croire que le (la) correcteur(trice) s'est arrêté de lire au bout d'une centaine de pages.
Cela devient de plus en plus désagréable et écorche les yeux du lecteur, les fautes étant de plus en plus nombreuses et rapprochées au fil des pages. C'est indigne d'une maison d'édition telle que Omnibus.
Les cinq romans qui composent ce tome sont les suivants :
Le conspirateur de Mars
Ulysses Paxton est sur un champ de bataille français, lorsqu'il est mystérieusement téléporté sur la planète Mars. Il se retrouve nez à nez avec un vieillard martien, à la peau rouge, comme tous les martiens, qui le provoque en duel. Une fois le combat terminé, après quelques péripéties, Ulysses devient l'élève du grand médecin qu'est Ras Thavas. En effet, cet éminent professeur est le seul à savoir transplanter un cerveau d'un corps à un autre.
Ainsi, lorsque le corps est trop vieillissant et en bout de vie, il suffit de payer une belle somme au professeur qui va alors transplanter le cerveau dans un corps jeune et sain, qu'il a acheté sur le marché des esclaves ou acquis de façon plus ou moins honnête.
Le terrien, que le professeur a rebaptisé Vad Varo, va devenir un disciple exemplaire. Mais tout va se corser lorsque la vieille impératrice, haïe de tous, va faire l'échange avec un corps de jeune femme superbe. Vad Varo va alors tout faire pour reprendre le cerveau de la jeune fille dont il est bien sûr tombé éperdument amoureux.Le voilà donc parti pour vivre de nombreuses aventures aux multiples rebondissements.
Le combattant de Mars
Hadron est un soldat de grade inférieur (ou moyen, j'avoue que je n'ai pas tout compris) et il tombe amoureux de la fille d'un personnage de la haute société martienne, qu'il ne pourra donc jamais épouser. D'ailleurs elle ne le regarde même pas.
Mais tout va changer lorsque cette jeune fille va être kidnappée et que Hadron sera volontaire pour aller la reprendre aux griffes d'un terrible et dangereux peuple de Mars.
On croise dans ce roman beaucoup de monstres en tous genres, très finement décrits ; les combats, nombreux, sont remarquablement racontés. Il y a beaucoup d'action, et même si l'écriture est un peu vieillotte ("nous combattîmes", "nous avançâmes"...) cela reste suffisamment rythmé pour donner envie de connaitre la fin.
C'est avec plaisir et surprise qu'on découvre un élément clé de ce roman : la cape d'invisibilité ! Eh oui, Harry Potter n'a rien inventé : En 1930, on savait déjà se promener sous une cape d'invisibilité.
Les épées de Mars
On retrouve ici le héros d'Edgar Rice Burroughs : le légendaire John Carter. La criminalité augmentant sans cesse, il décide de quitter son doux foyer pour se rendre incognito dans les bas-fonds de sa cité afin d'éliminer Urs, le chef incontesté des criminels.
Très vite il se retrouve embauché comme garde du corps d'un savant, qui lui aussi est un peu criminel. Ce savant a inventé, en volant parfois des idées à d'autres savants, un vaisseau hors du commun qui saura aller jusque sur Thuria, une des deux lunes de Mars. Ce vaisseau a une particularité exceptionnelle : il est piloté par un cerveau mécanique, dirigé par la pensée.
John Carter réussit à en prendre le contrôle et en aura bien besoin lorsqu'il va devoir partir à la recherche de Dejah Thoris, sa tendre princesse, que le roi des brigands a kidnappée. D'aventures en aventures, nous allons rencontrer des personnages intrigants, des situations rocambolesques, encore de l'invisibilité (notion qui a dû plaire à l'auteur lors de son roman précédent et qu'il réutilise ici).
Toujours un peu vieillot, c'est tout de même bourré d'action, de découvertes, de rebondissements, de clichés également. On a vraiment l'impression de voir un vieux film des années 50-60, où les gestes sont saccadés, les trucages visibles et les expressions des visages exagérées.
Malgré tout, la magie opère, et on se laisse vite prendre dans le tourbillon de l'imagination sans limite de Burroughs.
Les hommes synthétiques de Mars
On retrouve ici Ras Thavas, le vieux savant du premier roman Le conspirateur de Mars. Il a été fait prisonnier par un jeddak (une sorte de prince) qui veut conquérir le monde. Ras Thavas a mis au point une technique incroyable lui permettant de créer des êtres humains à partir de simples morceaux de tissus humains. Burroughs avait anticipé le clonage !
Ces "hormads" sont quasiment indestructibles car même si on leur coupe la tête, il suffit de jeter celle-ci dans une cuve remplie de tissu humain pour qu'un nouveau corps pousse sous cette tête. Bien sûr, impossible d'obtenir des corps et des visages parfaits. Tout est mélangé de façon aléatoire, des bras à la place des jambes, des oreilles à la place du nez, etc.
John Carter veut ramener le chirurgien chez lui car sa princesse est entre la vie et la mort et seul Ras Thavas pourra la sauver. Aidé de son lieutenant Vor Daj (narrateur de l'histoire), il va vivre de nombreuses aventures encore plus extraordinaires que les précédentes.
On est vite happé par ce scénario si rocambolesque, ces êtres difformes, l'échange des cerveaux qui met nos héros dans des situations désespérées, mais dont on sait bien qu'à la fin, tout se terminera bien.
J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman riche en trouvailles toutes plus surprenantes les unes que les autres et même si on baigne toujours dans cette atmosphère de série B, c'est si remarquablement bien fait qu'on ne boude pas son plaisir.
Bien sûr, on peut faire de nombreux reproches à l'auteur sur la construction de ses récits (des rebondissements parfois trop évidents, trop nombreux et trop rapprochés également, l'emploi de termes inventés pour toutes les notions de mesure du temps, de la distance, sans aucun intérêt pour l'histoire, la répétition de certaines scènes que l'on retrouve dans pratiquement tous les romans, la narration exclusive à la première personne du singulier et au passé simple, obligeant donc à user et abuser des "-âmes", "-îmes" et "-ûmes" jamais très dynamiques...) mais ce sont également tous ces petits détails qui font de ces romans ce qu'ils sont : un délicieux moment de lecture, empreint de nostalgie.
Llana de Gathol
Llana, la fille de la fille de John Carter, a disparu. Son grand-père part à sa recherche et va vivre de nombreuses aventures.
Dernier roman de ce recueil, il n'est pas celui qui m'a le plus plu. C'est moins surprenant que le précédent, parfois un peu brouillon, comme si l'auteur lui-même ne savait pas où aller.
Néanmoins, toute la partie se passant dans une cité où les gens se rendent invisibles est assez plaisante.
On découvre également les liens de parenté entre John Carter et Llana, et quelques remous amoureux assez amusants, tout en restant très prudes, bien entendu.
Mais en toute franchise, on peut se passer de cette lecture.
En résumé, trois bons romans, un plus brouillon et un vraiment excellent. Si vous ne vouliez (ou ne deviez) en lire qu'un, jetez-vous sur Les hommes synthétiques de Mars, une vraie pépite qui reprend tous les codes chers à Edgar Rice Burroughs, et bourré de trouvailles vraiment remarquables.