Les Chroniques de l'Imaginaire

Charly 9 - Guérineau, Richard & Teulé, Jean & Guérineau, Richard

Charles IX est encore tout jeune lorsque le roi, son frère aîné, meurt prématurément. Ainsi, à 22 ans, le voilà propulsé roi de France, à devoir gérer les affaires de l'état, entouré notamment de sa mère et de conseillers pour la plupart franchement sanguinaires. A présent, la grande décision à prendre concerne les huguenots, les protestants qui ont bien du mal à respecter les chrétiens sur le territoire. Alors, poussé par sa mère et ses conseillers, et malgré ses réticences, le jeune Charles IX est presque contraint d'accepter que l'on tue les huguenots. Presque pour être enfin tranquille. Et à la condition qu'il n'en reste quasiment plus pour venir le lui reprocher plus tard...

Et puis, ce massacre, qui a lieu le jour de la Saint-Barthelemy, commence à faire sacrément tourner la tête du roi. L'homme fait tout pour éviter un maximum ses austères conseillers, lui qui a même fait tuer celui qu'il considérait comme son propre père. A présent, il reste peu de choses pour égayer la vie de Charles IX : la chasse, qui est un véritable exutoire, les poèmes de Ronsard, et les visites à sa maîtresse, huguenote de son état...

Charles IX a ainsi bien une fille, Marie-Madeleine, qui vient de naître de sa gothique régulière, mais le jeune roi ne s'en préoccupe guère. Il est bien trop occupé à abattre de plus en plus, et froidement, des animaux de toute sorte. Les cauchemars lui envahissent de nouveau la tête, et il est bien plus facile maintenant de jouer les benêts, pour échapper aux devoirs du roi. Cela, c'est jusqu'à ce que du sang semble bientôt sortir de tous les pores de sa peau. Un sang qui coule inexorablement, et qui ne peut que faire penser à celui de centaines de victimes innocentes...

C'est sur une histoire de Jean Teulé (Le magasin des suicides, également adapté chez Delcourt), qui emprunte bien sûr à la véritable Histoire, que se repose cette histoire reprise avec brio par Richard Guérineau. Le dessinateur de la célèbre série Le Chant des Stryges laisse de côté les créatures ailées imaginées depuis bien longtemps par Eric Corbeyran, pour prêter son talent à cette histoire pour le moins accrocheuse.

Graphiquement, les personnages et les costumes sont magnifiques, de même pour les plans les plus audacieux, qui fleurent bon les heures de recherche et de multiples croquis.
Ainsi, c'est avec un regard halluciné et intéressé que l'on suit le parcours de ce jeune roi, qui ne sera pas resté longtemps au pouvoir, mais qui aura tout de même instauré la date actuelle du jour de l'an, entre autres, même s'il sera surtout connu par le massacre des protestants le jour de la Saint Barthélemy. L'événement déclencheur de cette histoire fournie (128 pages !), donc, est le point de départ d'une descente aux enfers, mentalement, de ce roi bien trop jeune pour supporter la pression qui est la sienne à la plus haute fonction de l'Etat français d'alors.

Le livre est aussi l'occasion de croiser quelques figures historiques, comme le chirurgien Ambroise Paré (et son autruche !), ou encore un Ronsard qui aime trop les femmes. L'ensemble est traité avec un mélange de vérité et d'humour agréablement décalé, qui n'est pas sans laisser un étrange goût, pour le moins inattendu et original, à la lecture de ces planches. Un livre à découvrir absolument, librement inspiré et réadapté, certes, mais de bien belle manière ma foi !