Les Chroniques de l'Imaginaire

Tunnel 57 (La grande évasion - 6) - Jouvray, Olivier & Brachet, Nicolas

Nous sommes en 1964, à Berlin. Le mur de la honte divise la ville en deux, comme l'Allemagne qui est séparée entre la RFA et la RDA. Du côté Ouest de la ville, il y a Tobias, un étudiant en art, qui ne supporte plus ce mur, qui le sépare de sa jeune sœur, Hanna. Et puis, il y a également Mathias, son meilleur ami, qui l'accompagne dans la vie étudiante et artistique. Aujourd'hui, Mathias accompagne Tobias pour un rendez-vous que le jeune homme ne louperait pour rien au monde. En hauteur, et avec des jumelles, il peut faire la conversation, par geste, avec sa sœur.

Hanna vit donc du côté Est de Berlin, avec des parents qui vieillissent de plus en plus. Notamment, le père d'Hanna et Tobias est devenu acariâtre, très vieille école. Il défend ainsi par exemple Hanna d'écouter de la musique, et de profiter des plaisirs de la jeunesse, finalement. Pour Noël, le gouvernement accepte que les familles franchissent le mur pour se retrouver. Tobias se retrouve ainsi à un dîner en famille, qui dérape à cause de son père. Hanna, elle, trouve une oreille attentive en la personne de Mathias, qui a une nouvelle fois accompagné son ami, et qui n'est pas franchement insensible aux charmes d'Hanna.

Alors, c'est décidé : les deux amis décident de trouver un vieux local non loin du mur. Avec une quinzaine d'autres camarades, ils vont creuser, et à une dizaine de mètres de profondeur, sous terre. L'objectif est de relier les deux parties de la ville, histoire de pouvoir faire passer Hanna et ceux qui le voudront bien de l'Est vers l'Ouest. La tâche folle démarre, pleine de discrétion : à la moindre fuite, ce sera bien compromis...

Cette sixième grande évasion, proposée par Delcourt, est donc un nouveau one-shot, qui s'inspire de faits réels : nous avons tous entendu parler de cette histoire folle avant la tombée du mur. C'est Olivier Jouvray qui scénarise ici, bien loin de l'univers fantasy de Majipoor par exemple ! Le récit est ici intéressant, et se déroule à un rythme savamment dosé : on ne s'ennuie absolument pas, et en même temps, on a le temps de laisser les personnages se présenter à nous, et d'en saisir les différents caractères et façons de se comporter.

Nicolas Brachet nous gratifie d'un dessin réaliste, tout en finesse, très joliment mis en valeur par les couleurs pastel de Anne-Claire Jouvray. Les crayonnés se devinent encore, faisant la part belle aux jeux d'ombres et de lumières qui ne manquent pas d'illuminer des visages aux expressions tout à fait convaincantes.

Ce sixième tome de La grande évasion est donc bien une réussite, à l'intérêt historique évident, qui constitue un très joli rappel des événements qui privaient il y a encore bien peu de temps un des principaux pays européens de liberté.