Les Chroniques de l'Imaginaire

1871 (L'homme de l'année - 5) - Pécau, Jean-Pierre & Dellac, Benoît

Nous sommes en mai 1871, dans un Paris où les rues sont à feu et à sang. Les Versaillais et leur allié allemand sont sous les feux de la rébellion, et les balles perdues sont légion en ces temps bien troubles. C'est dans ce contexte qu'on fait la connaissance d'Abdullah, un tireur africain très particulier, dans le sens où il sait parfaitement lire et écrire le français. Il tient même une correspondance écrite avec Antoine d'Abbadie, un ancien explorateur des terres d'Afrique qu'il dit être son père.

Car vingt ans plus tôt, Antoine d'Abbadie s'est vu remettre un cadeau un peu particulier, en la personne d'Abdullah justement, alors âgé de sept à huit ans. L'explorateur s'est attaché peu à peu à ce petit garçon intelligent, curieux et débrouillard, et il s'est décidé à l'amener chez lui, en France, à Hendaye, sur la côte basque, plus exactement. Là, Abdullah s'est régalé de tous les livres qu'il a pu trouver dans une bibliothèque fournie. En grandissant, l'appel du devoir est de plus en plus fort : le neveu de Napoléon a besoin d'hommes pour étendre l'emprise de la France, et Abdullah est irrésistiblement attiré.

Mais le jeune homme, même s'il fait preuve d'une force et d'un courage exceptionnels lui valant nombre de distinctions, ne peut s'empêcher de s'éloigner peu à peu des idées de Napoléon III. Sur tous les fronts, que cela soit en Italie, en Algérie, ou même en Alsace, il supporte de moins en moins les bassesses faites aux soldats de couleurs...

Cet Abdullah est bien évidemment un héros qui a une vie bien remplie, et donc bien agréable à suivre dans ce cinquième tome de L'homme de l'année. C'est Jean-Pierre Pécau qui est au scénario, et Benoît Dellac qui le met en images, avec des couleurs assurées par Thorn.

Ce nouveau tome est donc encore une fois un one-shot, qui s'intéresse à l'année 1871.
Comme d'habitude, le contexte historique est mouvementé et diablement présent dans le récit de Pécau. Les voyages sont également à l'honneur, que cela soit par la diversité des lieux, ou par les flashbacks temporels. On passe allègrement de Paris en flammes, aux paysages sauvages de l'Afrique, et on repart dans le désert algérien, ou dans les neiges hivernales de l'Alsace. Tous ces lieux et toutes ces époques sont d'ailleurs parfaitement retranscrites graphiquement, avec un dessin détaillé et des couleurs impeccables. Les expressions des visages sont réussies, et les décors sur les plans larges le sont également.
Le récit est quant à lui assez complexe : il n'y a pas forcément besoin d'être un féru de l'Histoire de la période pour suivre, mais il est vrai que la diversité des lieux, les revirements d'idées et les flashbacks font de ce livre un objet à lire de manière attentionnée si on souhaite en extraire toute la quintessence.

Une nouvelle réussite dans cette série, même si elle restera un ton en dessous du tout premier tome.