Les Chroniques de l'Imaginaire

Zulu

Le corps sans vie de Nicole Wiese vient d'être retrouvé sur les pelouses verdoyantes du jardin botanique du Cap. Le visage de la jeune femme a été ravagé à coups de poing et une nouvelle variété de tik coule dans ses veines...
Le capitaine Sokhela et son équipe, les inspecteurs Epkeen et Fletcher, sont sur l'affaire, qui prend vite une importance politique du fait du père de la défunte et de ses habitudes. Une jeune blanche issue de l'élite sud-africaine démolie et défoncée à la poudre de joie des townships, voilà les éléments d'une enquête ultrasensible dans une Afrique du Sud qui n'est jamais bien loin de ses démons du passé.

Zulu est l'adaptation du brillant roman du même nom de Caryl Férey, un auteur français. La transposition à l'écran d'un livre n'est jamais une sinécure, d'autant plus lorsque celui-ci est complexe dans son intrigue, dans son environnement et qu'il possède une puissance émotionnelle forte.
Salle, le réalisateur, est parti en Afrique du Sud pour tourner avec, dans ses bagages, des acteurs hollywoodiens connus (Bloom et Whitaker). L'objectif est de donner à Zulu une envergure internationale et de ne pas se limiter au marché français. L'histoire s'y porte bien et si le résultat est bon, Zulu se positionnera parmi les bons films policiers de ce début de siècle.

Le tournage sur place apporte d'indéniables avantages comme pouvoir travailler avec des acteurs locaux plutôt doués, bénéficier des splendides paysages et lumières du Cap et profiter de l'atmosphère qui émane de cette grande ville multi-ethnique aux contrastes effarants.

Le film est globalement bien réalisé et il est soutenu par une bonne prestation de la part des acteurs. Bloom dans le rôle d'Epkeen est méconnaissable et ce rôle de flic cynique et alcoolique lui va comme un gant. Whitaker s'en sort, également, très bien avec le capitaine Ali Sokhela (Neuman dans le livre) même si, physiquement, il ne correspond pas à l'image que j'en avais. Whitaker ressemble plus à un intellectuel endimanché qu'à un zoulou athlétique et directeur.

L'action, le rythme et l'ambiance originale prennent relativement facilement. Un début de suspense s'installe pendant la première moitié du film. Par la suite, la tension se relâche suite à plusieurs raccourcis scénaristiques brouillons, à un manque de profondeur et à l'absence de véritable choc émotionnel. Zulu, qui aurait pu être une œuvre noire efficace et innovante grâce au roman de base, se dégonfle complètement passée la première heure. Il n'en reste qu'un très classique polar, certes divertissant et original grâce au climat sud-africain mais affaibli par un scénario superficiel et une impression de trop peu.

Néanmoins, ce dernier suit fidèlement le texte de Férey pour l'intrigue policière, ce qui est, a priori, une bonne chose. Malheureusement, on se rend rapidement compte que le film est trop court pour suivre le caractère tortueux du scénario du bouquin. Le réalisateur met en images certaines scènes importantes du récit juste parce qu'il le faut, sans les expliquer et sans leur contexte. Ces incongruités scénaristiques plombent le film et cassent sa fluidité.
De plus, d'autres éléments cruciaux du roman sont passés à la trappe. L'historique de la société sud-africaine est oublié, les tensions politiques et raciales sont absentes, le passé de Sokhela/Neuman est résumé en quinze secondes, etc. Sans ces piliers, l'histoire devient bancale. Au contraire du lecteur, le spectateur ne peut pas profiter de ces informations pour maîtriser les tenants et aboutissants du récit, ce qui donne l'impression d'un film bâclé et précipité.

En conclusion, Zulu souffre nettement de la comparaison avec le livre de Férey. Pris seul, il demeure un polar sombre dépaysant, correctement réalisé et bien interprété, tout en demeurant moyen au niveau du scénario et peu surprenant. Toutefois, au vu du matériel de départ, on aurait pu espérer mieux.