C'est à Venise que l'on retrouve Corto Maltese, alors que la nuit est tombée. On pourrait penser que la tranquillité règne, et on serait alors bien loin de la vérité. Corto tente d'échapper à des poursuivants, et se retrouve à dégringoler, pour atterrir au beau milieu d'une réunion franc-maçonnique, à laquelle il ne peut bien évidemment pas assister. Les membres franc-maçons s'assurent tout de même qu'il va bien, que les lieux sont sûrs, et que Corto peut partir en paix.
Rapidement, Corto retrouve son Faliero, un ami qui l'aide dans sa quête. Si Corto est à Venise, c'est pour mettre la main sur ce qu'on appelle la clavicule de Salomon, qui est une pierre légendaire qui a été perdue et retrouvée plusieurs fois à travers les âges. Une pierre qui, surtout, serait une énorme émeraude, à la valeur inestimable.
Évidemment, qui dit émeraude inestimable dit nombreux protagonistes, forcément pas toujours très avenants, désireux de mettre la main sur la pierre les premiers ! Et de ce côté là, Corto sera particulièrement servi, entre les autochtones vénitiens comme Hipazia, une femme mystérieuse à la troublante beauté, ou encore Faliero ou Stevani, qui joueront tous un rôle important dans cette histoire.
C'est à une fable que nous convie Hugo Pratt dans ce Fable de Venise, qui constitue une aventure complète de Corto Maltese. Les lieux sont superbes, puisque l'on parle de la ville des amoureux, qui a parfaitement été mise en image par Hugo Pratt avec son trait détaillé et d'une grande délicatesse. L'architecture n'est pas sans rappeler à présent certains dessins de Tardi, qui ne sont pas sans avoir de nombreux fans également...
Les personnages sont eux aussi bien évidemment très travaillés, avec des expressions soignées. Cela les rend attachants, avec une mention particulière pour Corto et Hipazia, qui ne manquent pas de charisme.
Cette fable sort donc ici en couleur et en petit format, chez Folio, et il faut bien reconnaître que les planches se prêtent agréablement à ce format. L'ensemble garde une très bonne lisibilité, même si on a plus de mal à apprécier le détail de telle ou telle case, notamment sur les plans très larges dont les décors fourmillent de détails. Du côté du récit, j'avoue avoir eu un peu de mal à accrocher avec une histoire qui mêle la réalité avec l'onirisme, pourtant indispensable dans ces lieux. Le fil rouge n'est pas évident à suivre, ce qui aura sans doute l'avantage de rendre utiles de multiples lectures.
Une réédition qui tombe en tout cas à point nommé pour le jeune public qui n'est pas encore familier avec le travail du regretté Hugo Pratt !