Les Chroniques de l'Imaginaire

Melisande ! Que sont les rêves ? - Halkin, Hillel

Une rencontre, trois personnes : Hoo (Howard), Ricky et Mellie (Mélisande). Le journal du lycée les a réunis dans une même passion. Très rapidement, ces trois là deviennent inséparables. C'est l'Amérique des années soixante, et les causes sont nombreuses et les trois amis très engagés. Ils sont emportés par l'histoire et les volutes baba-cool de l'époque. Rapidement, des sentiments se développent entre Ricky et Mellie. Mais Ricky semble se perdre un peu dans ce monde qui n'est pas vraiment le sien. Il part régulièrement pendant de longues périodes. Il disparaît pendant des semaines, sillonne les États-Unis, puis l'Inde. Il songe à une vie sans attache matérielle, celle d'un mendiant. Mellie subit ces changements. La folie grandit, et la jeune femme peut compter sur l'indéfectible mais impuissant soutien de Hoo. A la suite d'une crise particulièrement violente, Ricky est interné. C'est certainement ce qui provoquera le rapprochement entre Mellie et Hoo, leur mariage, et d'une certaine manière, une longue traversée du désert.

S'il fallait résumer ce roman en quelques mots, je dirais que c'est une longue et émouvante lettre d'amour.

Ce sont vingt-cinq ans de vie qui sont disséqués, passés au crible des émotions. Les personnages sont d'une très grande justesse, leur parcours aussi. C'est un peu une description, ou une illustration par l'absurde, de la courbe que peuvent prendre vos convictions et vos espoirs une fois confrontés à la vie réelle.

Beaucoup de douceur, beaucoup de tendresse donc pour aborder ce trio amoureux, une plume tout en finesse, toute en légèreté, qui nous fait oublier instantanément qu'Hillel Halkin a attendu plus de soixante-dix ans pour nous offrir cette lecture. Tout est écrit ici comme un long flash-back, un retour sur une vie.

Cet ouvrage est un vrai questionnement, une réelle nécessité de laisser sortir tout ce que l'homme amoureux n'a jamais pu dire à sa femme. Une occasion enfin aussi d'analyser leur vécu et leur amour, sous les touches discrètes des références littéraires de Hoo. Globalement le bonheur conjugal y apparait comme un peu ampoulé, vaguement utopique, ou légèrement entaché de l'ombre de quelque chose (ou peut-être en l'occurrence de quelqu'un).

Ce qui me retient de qualifier cet ouvrage de réel coup de cœur, c'est probablement cette tendance qu'il a de pencher sauvagement vers l'analyse philoso-psychologique d'un phénomène et d'une histoire qu'il faudrait juste savoir se contenter de recevoir.

Malgré cela, la lecture se termine sur un sourire, sur un espoir, et ça, ça me plait beaucoup.