Les événements relatés ici se sont déroulés il y a bien longtemps, bien avant toutes les mythologies, grecques ou romaines, que l'on connaît. C'est un temps qui a justement donné naissance à tous ces mythes, un temps où les hommes, encore peu nombreux, vivaient en plus ou moins bonne harmonie avec neuf autres peuples, qui représentaient les différents animaux que l'on connaît aujourd'hui.
Et tout commence plutôt mal, puisque Dahouti, le très haut prêtre humain, décide subitement de ne plus servir son peuple, se débarrassant de ses pouvoirs et de son cur, sous les yeux ébahis des soldats, dont Hémen, qui l'accompagnent...
L'événement est visible à des lieux à la ronde, et il met en péril le fragile équilibre qui existait jusque-là entre les peuples. C'est en cette période que l'on retrouve également Aha, un autre humain, plutôt nain et totalement ripailleur et vicelard, qui passe son temps à écumer les tripots de la ville, toujours en compagnie d'au moins une serveuse. Aha répand la bonne humeur autour de lui, mais il n'hésite pas à tricher aux jeux d'argent, s'attirant les foudres d'une partie de la population, qu'elle soit humaine ou autre...
Aha a aussi et surtout la particularité d'être invulnérable, ce qui le rend parfaitement indispensable sur les champs de bataille notamment, ou lorsqu'il faut envoyer un émissaire parlementer avec des espèces bien plus sauvages, comme les Ded-Wen notamment. Toujours est-il qu'Aha est un atout précieux pour les humains, et qu'il va vite se retrouver au centre du voyage qui va devoir rétablir l'équilibre rompu par Dahouti. De quoi faire un sacré voyage, dans des conditions pas toujours faciles, au milieu des êtres qui évoluaient en ces temps reculés !
C'est avec une bonne dose de curiosité qu'on commence la lecture de ce premier tome de Le dixième peuple, qui sera un diptyque qui se clôturera en 2015. Immédiatement, le lecteur est accueilli par une présentation des différents peuples et de leurs territoires. Un état de fait qui laissera toute latitude à Emmanuel Despujol de dessiner des personnages à têtes d'animaux, et ce pour son plus grand plaisir ! Chaque personnage est ainsi particulièrement attachant, d'autant que les attitudes et les expressions sont toujours très soignées, que ce soit sur une tête de félin, ou sur une tête d'hippopotame, de reptile, ou encore de crocodile...
Emmanuel Despujol se régale ici, et cela se ressent : certes, nous ne sommes pas encore au niveau d'une série comme Blacksad, mais l'univers dépeint, qui tire beaucoup plus vers de la fantasy que vers du polar, fait en sorte que la comparaison s'arrêtera là. De surcroît, les couleurs de Myriam Lavialle sont à l'avenant, avec des cieux réalistes, des atmosphères enfumées de toute beauté, et des jeux de lumière plutôt réussis eux-aussi.
Le rythme de ce premier tome est lui aussi parfaitement maîtrisé, et on se surprend à arriver au bout de cette lecture avec cet agréable sentiment de ne pas avoir vu le temps passer. Le seul reproche que l'on pourrait faire est d'avoir peut-être un petit manque d'originalité, et là encore, cela dépendra vraiment de votre passé de lecteur ! Une excellent surprise pour ma part en tout cas, dont j'attends la suite avec impatience !