Les Chroniques de l'Imaginaire

Le Petit Chaperon rouge (théâtre) - Pommerat, Joël

En se rendant chez sa grand-mère pour lui apporter un flan de sa confection, une petite fille rencontre le loup. Celui-ci lui propose de faire la course jusque chez la grand-mère, en empruntant chacun un chemin différent. Affamé, il espère bien croquer tant la petite fille que sa grand-mère ! L’enfant a un peu peur, mais essaie de surmonter cette méfiance pour se prouver qu’elle est une grande fille…

Cette création théâtrale revisite un des plus célèbres contes de la tradition populaire, celui du Petit Chaperon rouge. Si les éléments les plus attendus sont toujours là (la première rencontre avec le loup sur le chemin, puis celle chez la grand-mère lorsque le loup se fait passer pour celle-ci pour attirer la petite fille), c’est cependant une version très moderne, dans le langage mais aussi les petits détails. Ainsi, la petite fille s’ennuie, son père étant absent et sa mère trop occupée, tandis que la grand-mère est un peu délaissée car trop loin à visiter… Il faut noter également que cette version ne s’adresse pas seulement à un public enfantin, mais saura séduire un public de tout âge.

Si j’ai donc trouvé cette pièce intéressante et agréable, il y a malheureusement plusieurs bémols qui ont assombri ma lecture. D'abord, la longueur : c’est extrêmement court, à peine une mise en bouche semble t’il avant la dernière réplique. Ensuite, la syntaxe : certes, un texte de théâtre est destiné à être entendu plutôt que lu, mais il est extrêmement désagréable d’avoir constamment des phrases qui passent à la ligne sans raison et des virgules nécessaires qui sont omises. Cela rend le texte difficile à lire, d’autant que la partie narrative (attribuée au personnage de « L’Homme qui raconte ») est largement plus développée que les rares dialogues entre les encore plus rares personnages (à l’origine, le spectacle a été créé avec seulement trois acteurs).

Cependant, ce qui a vraiment rendu la lecture de ce livre indigeste, c’est la postface de Marion Boudier. Le nombre de pages est identique pour la pièce et l’analyse, mais celle-ci est beaucoup plus dense (longs paragraphes, petits caractères). Certes, c’est l’occasion pour le lecteur de découvrir les dessous de la création de ce spectacle, par exemple le fait qu’il s’agisse du résultat d’une recherche de plateau, les registres de jeu ou les bruitages associés aux différentes scènes, ce qui est plutôt intéressant.
Mais dans l’ensemble, cette analyse est très lourde. L’auteure use de mots recherchés et de phrases compliquées à outrance : je peux comprendre le bien-fondé du fait de parler à plusieurs reprises des didascalies, mais l’épicisation de la forme dramatique ou la promesse de palimpsestes tirés de l’œuvre me laissent dubitative. Le texte du spectacle est souvent repris tel quel pour analyse, mis en relation avec des interviews de Joël Pommerat ou d’autres de ses textes, tout cela restant très obscur pour le lecteur qui n’est pas un fan absolu de l’auteur-metteur en scène. En découvrant tout ce que l’analyste imaginait derrière ce texte, je me disais surtout que certains aiment se faire des nœuds au cerveau !

Je vous conseillerai donc d’aller voir le spectacle plutôt que de le lire, et surtout de vous abstenir de la postface si vous n’aimez pas disséquer les textes à outrance.