Les Chroniques de l'Imaginaire

Disparition d'une femme : L'affaire Viguier - Durand-Souffland, Stéphane

Le 27 février 2000, une femme disparaît. Il s'agit de Suzanne Viguier, dite "Susy", mariée à un universitaire, mère de deux enfants. On n'entendra plus jamais parler d'elle et on ne retrouvera jamais son cadavre. Malgré l'absence d'indice (et de corps), les soupçons se tournent rapidement vers le mari de la disparue, Jacques Viguier. L'homme passera deux fois devant la cour d'assises, pour finalement être innocenté quelques dix ans plus tard...

Les preuves contre Jacques Viguier sont inexistantes, mais son caractère réservé et peu communicatif lui fait adopter un comportement qui va dérouter les enquêteurs. Une fois officiellement soupçonné, sa tactique de défense va être du même tenant. Comme il est convaincu de son innocence, il ne fournit aucun effort pour le prouver, persuadé que la justice ne peut le condamner pour un crime qu'il n'a pas commis. Pourtant, agacés par sa froideur et son détachement apparents, les enquêteurs se persuadent rapidement qu'ils tiennent leur coupable et vont tout faire pour le prouver, quitte à présenter les faits dans un sens qui arrange leur vision de l'enquête. Ils vont être aidés en cela par l'amant de la disparue. En effet, ce dernier prend dès le départ l'enquête très à cœur et ne va avoir de cesse de faire accuser son rival. Sa conduite inappropriée sera mise à jour dans le second procès de Jacques Viguier, où l'on découvre qu'il n'a pas hésité à manipuler les témoins pour leur faire dire ce qui l'arrange...

Cette affaire sordide pose question sur le fonctionnement de la justice, et notamment sur le travail des enquêteurs. Ici, rien n'a été fait pour connaître la vérité sur la disparition de Suzanne Viguier. Les enquêteurs se sont immédiatement convaincus de la culpabilité du mari et ont considéré toute l'affaire avec ces œillères.

Stéphane Durand-Souffland, chroniqueur judiciaire pour Le Figaro, a suivi cette enquête du début à la fin. Il relate ces développements dans un style clair et sans parti-pris. Son analyse est sérieuse, sa documentation solide.

Un récit dérangeant, à la fois parce que la lumière n'a jamais été faite sur la disparition de Suzanne Viguier et à cause de l'acharnement qu'a subi son époux. On pourrait avoir l'impression de lire un roman policier tant cette affaire illustre l'adage "la réalité dépasse la fiction."