Les Chroniques de l'Imaginaire

Le journal de mon père - Taniguchi, Jirô

Yoichi vit à Tokyo et son travail ne lui laisse jamais le temps de retourner à Tottori, sa ville natale, pour rendre visite à sa famille. Du moins est-ce l’explication officielle, car si le temps manque, c’est surtout l’envie qui lui fait défaut. Le divorce inattendu de ses parents alors qu’il était enfant (et qu’il a mis à tort entièrement au compte de son père), l’abandon par sa mère qui a refait sa vie au loin, le manque de disponibilité de son père contraint de travailler sans cesse pour régler ses dettes, tous ces éléments ont rendu douloureuse sa vie auprès des siens. C’est pourquoi il s’est empressé de les quitter après le lycée, ne retournant à Tottori que quand il ne peut faire autrement.

Cette fois, c’est la mort de son père qui le ramène dans sa ville natale après quinze ans d’absence. En traversant la ville, il est d’abord pris de nostalgie, réalisant son amour pour ce lieu qu’il a quitté depuis si longtemps. Ensuite, il est surpris lors de la veillée funéraire de découvrir tous ceux qui viennent honorer le mort et l’accueillent chaleureusement, lui le fils prodigue. Au fil de la soirée, les langues se délient et tous évoquent leurs souvenirs, à commencer par le grand incendie de 1952 qui força les parents de Yoichi à repartir de zéro, provoquant en fin de compte leur rupture. Pour Yoichi, c’est l’occasion de découvrir un père bien différent de ce qu’il s’est toujours imaginé, généreux et aimant, et de se remettre en question.

Le journal de mon père fait partie des titres les plus réputés de Jirô Taniguchi. Alors que je suis depuis longtemps une grande admiratrice de l’auteur, je n’avais pourtant jamais eu l’occasion de découvrir cet album. C’est désormais chose faite et j’avoue avoir détrempé un certain nombre de mouchoirs lors de ma lecture.

Narré à la première personne par Yoichi, le récit alterne scènes du présent et souvenirs, teintés par les informations apportées par les différents intervenants de la veillée. C’est une histoire très intimiste dans laquelle l’auteur a mis beaucoup de lui-même (par exemple la ville natale ou le métier du père, coiffeur). L’émotion est très forte tout au long de la lecture. On ressent en profondeur le bouleversement qui affecte Yoichi lorsqu'il découvre son père sous un nouveau jour et est pris de remords de s’être volontairement éloigné et d’avoir négligé ses attaches, causant ainsi une grande peine à sa famille qui ne l’avait pas méritée. A travers les yeux de Yoichi, le lecteur réalise l’importance de l’amour de ses proches et de la conservation des liens familiaux.

Un album incontournable, que ce soit pour ceux qui veulent découvrir l’auteur ou ceux qui l’apprécient déjà, et qui donne envie de passer un bon moment avec ses proches