Eutopia, une cité idéale où vivent dans le luxe, l'oisiveté et l'opulence mille trois cent chanceux. Alors que toute vie sur Terre a été détruite suite à une catastrophe écologique sans précédent, une poignée de privilégiés a pu rejoindre la cité dôme d'Eutopia. Et c'est là que depuis deux siècles, au gré des transferts corporels, ils continuent à jouir d'une vie rêvée. Tous les cinquante ans, les mille trois cent résidents changent de corps. Un implant leur promet de conserver leur caractère et les comportements acquis mais leur mémoire est effacée. C'est un renouveau perpétuel, une sorte d'immortalité.
Au dehors, grâce à des manipulations génétiques, la vie a repris bon an mal an dans un seul et unique but : assurer le bien-être des habitants d'Eutopia. C'est ainsi que des hommesGM ont été créés, capables de résister à la pollution externe afin d'assurer la culture du bléGM, seul autre organisme vivant pouvant se développer et surtout unique carburant encore disponible et indispensable à la survie de la cité.
Orian, un des heureux Eutopiens, ne goûte pourtant pas au bonheur autant qu'il devrait. Depuis son dernier transfert, il a le sentiment diffus mais constant de ne pas être à sa place, que quelque chose cloche. Même la belle Tiris, avec qui il va bientôt être apparié, ne l'emplit pas de désir. Du moins pas d'un désir entier et profond. Alors qu'il accepte néanmoins de l'accompagner dans sa chambre, ils sont surpris par lirruption de deux hommesGM. Et dès lors, tout va basculer...
Dans ce roman futuriste, l'homme a été trop loin et a réussi à détruire la Terre. N'a survécu qu'une poignée d'élus à l'intérieur d'un dôme hermétique. Au dehors, plus aucune vie, ni animale ni végétale, à l'exception de deux organismes crées en laboratoire pour résister à la pollution. Ce roman est ainsi un plaidoyer pour la préservation de notre environnement, contre les manipulations génétiques irréfléchies. Il est urgent de prendre conscience que notre planète est fragile et que, si on ne fait rien, on court droit à la catastrophe.
Mais Eutopia n'est pas uniquement une fable écologiste, loin de là. C'est avant tout une accusation de notre société de consommation et ultra-capitaliste, où l'appât du gain d'une poignée entraîne le reste de notre planète vers sa destruction, où le bien-être d'un individu peut justifier l'exploitation des masses, où le bonheur immédiat et futile est placé avant tout le reste. Le pouvoir de l'argent pour l'argent. Le système présenté par Jean-Marie Defossez est terrifiant, d'autant qu'il trouve des échos dans notre société actuelle. D'ailleurs, l'auteur n'hésite pas à appuyer son discours par des notes en bas de page.
C'est au cur de cette société corrompue qu'on rencontre Orian. Il fait partie des privilégiés mais il a le sentiment de ne pas être à sa place. Le hasard va lui faire découvrir l'envers du décor et, bien évidemment, il va tenter de changer la donne.
L'auteur cherche clairement à éveiller les plus jeunes sur l'urgence de repenser notre économie, de préserver notre environnement, de chercher des solutions à long terme. Si les idées présentées dans ce roman sont intéressantes, surtout grâce au parallèle qu'on peut faire avec notre vie actuelle, elles sont desservies par un style qui tend vers le prêchi-prêcha maladroit. L'auteur assène ses idées au détriment du reste. L'intrigue semble parfois bâclée, les personnages paraissent creux, sans nuance et le récit regorge de phrases maladroites qu'on croirait sorties d'un mauvais livre de propagande.
Sans être désagréable à lire, Eutopia est un roman où le fond a pris le dessus sur la forme. C'est dommage car il y avait matière à livrer une histoire passionnante, en soignant le style, les personnages et l'intrigue.