Les Chroniques de l'Imaginaire

Ghost Stories

Cette nuit, l'immonde Wufeng revient sur terre. Ses légions damnées ont retrouvé ses cendres cachées par des religieux dans un village anonyme de la Chine fantastique. Quatre moines veillent. Ils auront la lourde tâche d'empêcher le retour des ténèbres, quatre moines aux capacités spéciales qui, aidés de quelques villageois courageux, vont renvoyer le Wufeng dans les enfers dont il ne doit jamais sortir. Ces quatre moines, ce seront vous et vos amis.

Ghost Stories est un jeu de plateau coopératif créé et développé par Bauza en 2008. Le jeu se joue à quatre idéalement et les parties durent de trente à soixante minutes. Il conviendra mieux à des joueurs aguerris ou à des débutants motivés et bien accompagnés.

L'objectif du jeu est de renvoyer le ou les Wufengs dans le néant (ou, au moins, la pile de défausse). Pour cela, chaque joueur incarne un moine taoïste doté de deux pouvoirs spéciaux (un seul sera utilisable au cours d'une même partie). Ceux-ci permettent, par exemple, de lancer un dé d'exorcisme supplémentaire, d'affaiblir un fantôme, de demander gratuitement l'aide d'un villageois, de déplacer un autre moine sur une tuile adjacente, etc.
Le village est le centre de l'action, il est composé de neuf tuiles qui forment la majeure partie du plateau de jeu. Chacune d'entre elles possède une capacité spéciale qui viendra en aide aux joueurs s'ils l'activent. Le village est entouré de quatre zones d'entrée de fantômes ; sur chaque zone, il y a trois chemins d'accès pour ces derniers.
Le jeu se déroule par tour ; le tour est décomposé en plusieurs étapes qui sont groupées en deux catégories, le yin et le yang. Les fantômes bougent et apparaissent pendant la phase yin et les joueurs agissent pendant le yang.

Il y a plusieurs classes de fantômes, les "gentils" qui ne font que bloquer une case de la zone d'entrée, les hanteurs qui se déplacent jusqu'au village pour hanter une tuile (ce qui désactive le pouvoir du villageois et amène - très vite - à la première possibilité d'échec : trois tuiles hantées) et les tourmenteurs. Ceux-ci maudissent les moines (jet d'un dé de malédiction) et sont extrêmement dommageables quant au bon déroulement de la partie.
Puisque les fantômes agissent au début du tour de chaque joueur, ils peuvent, donc, vite envahir les zones de départ et le village si les moines ne s'activent pas efficacement, d'autant qu'une zone de départ pleine signifie la perte d'un point de vie pour le joueur de cette couleur. Si l'ensemble de l'équipe arrive à zéro point de vie, le Wufeng gagne.

Heureusement, les joueurs ont tout un arsenal à leur disposition pour exorciser les sbires du Wufeng. En se déplaçant dans le village et selon leurs possibilités, ils activent les pouvoirs de certains villageois et ils préparent le terrain pour faciliter le travail de leurs collègues. En fonction de leur placement, à chaque tour de jeu, ils peuvent tenter une attaque pour faire disparaître un, voire deux fantômes. Le système est simple. Un fantôme possède un certain nombre de points de vie représentés par des disques de couleurs. Pour l'abattre, le moine doit jeter trois dés 6 dont les faces sont ces disques de couleurs. Si le jet donne autant ou plus de couleurs que le fantôme, celui-ci est vaincu et libère sa case. Pour aider les moines, des jetons de tao de différentes couleurs sont à récolter et échanger pendant le combat. En outre, quelques pouvoirs peuvent également affaiblir les fantômes et aider les joueurs. Cette aide est indispensable pour battre les ennemis à quatre points de vie ou plus.

Ce système de jeu est fluide et se comprend assez vite pour des gens motivés. Il rend l'ensemble particulièrement captivant et plaisant. On s'amuse vite et on a envie d'y rejouer, même après une défaite minable en cinq minutes. Ce genre de jeu se sort facilement en soirée avec des amateurs de jeux de société, d'autant que les séances durent moins d'une heure.

Cependant, attention, car compte tenu du hasard, de l'importance de l'anticipation et de la préparation tactique des mouvements, les combats deviennent vite tendus. Un manque de chance, autant aux dés que pour les malédictions ou l'ordre de pioche des fantômes, peut frustrer et agacer les joueurs. Cet aspect aléatoire ne va pas plaire à tout le monde.
De plus, si à ce manque de bol s'ajoute un défaut de concentration ou une méconnaissance des mécanismes du jeu (pourtant clairs, simples et relativement intuitifs), la partie peut rapidement se terminer et Ghost Stories décourager ses joueurs. Ce n'est pas un jeu pour débutants, il demande de l'implication et, généralement, il vaut mieux avoir un joueur expérimenté autour de la table. C'est typiquement un jeu à tester dans votre magasin spécialisé favori.

Pour finir après cet avertissement, quelques petites choses m'ont dérangé dans Ghost Stories. L'éditeur n'a pas traduit en Français (ou en Chinois pour l'ambiance) le nom anglais des fantômes sur les cartes. Ensuite, j'ai bien du mal à distinguer le jaune (orangé) du rouge (orangé) sur les dés, pourtant je ne suis pas daltonien. Enfin et étrangement pour un jeu que j'aime beaucoup, je n'accroche pas du tout au thème choisi par Bauza : la lutte fantastique entre des moines et des fantômes chinois, bien que le matériel et les illustrations soient plus que corrects.

En conclusion, Ghost Stories est un très bon jeu de plateau qui demande un excellente coopération de la part des joueurs et un grand sens tactique. Le dialogue est permanent, le système est facile à apprendre et fonctionne bien. C'est un jeu que je sors dès que j'en ai l'opportunité.