Ce n'est pas possible... Ça ne peut pas lui arriver à lui... François roule, droit devant lui. Le monde est entre parenthèses. Il fuit comme un fugitif en cavale. Il fuit cette mort qui, quoi qu'il arrive, va le rattraper bientôt. Très bientôt. Après tout, qu'est ce qu'il pourrait bien dire à Florence ? Comment pourrait-il encore vivre avec elle en ne voyant dans ses yeux que douleur et pitié ? Non, ce n'est pas possible, définitivement. Il ne pourra pas lui dire. Il ne pourra pas lui en parler. Ce sera peut-être plus facile avec cet étranger, ce jeune homme qu'il a pris en stop à Lyon. Paul. Il s'appelle Paul et paraît lui aussi fuir quelque chose, sans que François ne sache exactement quoi. Finalement, ces deux hommes que tout sépare vont suivre une trajectoire similaire : celle de la fuite en avant.
C'est triste, c'est noir, c'est fataliste. Oui. Mais finalement, c'est aussi et surtout rempli d'un espoir insensé, d'une espèce de foi en l'être humain. Un peu comme si l'on avait oublié trop longtemps une capacité magique à l'autoguérison.
Une belle histoire donc, où Karine Giebel a utilisé toute la noirceur de sa palette pour souligner les jolies couleurs du cur. Un style direct et une plume légère servent parfaitement cette histoire. Le rythme est parfait, des respirations juste où il faut et parfois, une sensation dessoufflement calculé, comme si l'auteur nous mettait pour quelques lignes dans la peau de ses personnages.
Alors, oui, c'est vrai, il y a ce côté parfois complètement incroyable qui pourra faire dire à certains que tout cela est un peu trop facile. Oui, mais... Mais après tout pourquoi pas ? Pourquoi ne pourrait-il pas arriver dans la vie des choses totalement incroyables ? Pourquoi ne pas y croire ? Les réactions de François, tout aussi incroyables par ailleurs, en sont une parfaite illustration. Peut-être devrions nous simplement en garder la tacite tolérance de toute chose, l'incroyable faculté d'acceptation qui réside en chacun de nous, tout autant que les extrémités auxquelles il faut parfois arriver pour laisser tout ceci s'exprimer librement.
Les personnages sont bien pensés et plutôt justes. Un peu ébauchés au début, ils gagnent en épaisseur et en humanité au fil des lignes, car disons-le bien, ce grand avocat n'est à l'origine guère plus humain que le petit voyou.
Un très bon moment de lecture que je conseille vivement, et essentiellement aux amateurs de romans un peu sombres.