Les Chroniques de l'Imaginaire

Anomalie P - Pajot, Stephane

Tristan Madec, c'est le conducteur de l'éléphant de l'île de Nantes. Il vit sa solitude dans son passé, à l'aide du Batraxil, la nouvelle drogue à la mode, surtout depuis que Lou l'a quitté. Il cherche assez clairement à fuir le monde, d'autant qu'il ne tourne visiblement pas si rond que ça, le monde, en ce moment... Un professeur étrange l'embauche pour pécher des grenouilles aux orteils surnuméraires, un pécheur est assassiné et Pablo disparaît sur le lac pendant son enterrement de vie de garçon. C'est étrange tout cela, et ça l'est d'autant plus que Tristan est aspiré régulièrement auprès d'Anton, son frère décédé dans sa jeunesse, dans un monde étrange, mythique. Bien malgré lui, il va être entraîné dans une mission de sauvetage un peu incongrue.

N'avez vous jamais eu la sensation en finissant un bouquin qu'il devait certainement exister des mondes parallèles ? L'un dans lequel évolue le commun des mortel, et l'autre qui accueille l'auteur du livre que vous venez de finir ?

Nous ne sommes pas ici dans la bizarrerie programmée ou volontairement provocatrice. Non, nous sommes dans un univers à part, celui de monsieur Pajot. A se demander parfois s'il ne plonge pas lui même régulièrement dans le Batraxil. C'est déstabilisant, surtout pour entrer dans la lecture. Mais cela participe aussi à mieux percevoir l'ambiance et le quotidien de Tristan.

Les personnages ne sont pour la plupart qu'ébauchés. Seul Tristan a une certaine constance pendant tout l'ouvrage. Il n'en est pour autant pas vraiment le héros. Il servirait presque plus de fil rouge. Il n'y a pas de réel attachement et une certaine distance s'installe. Il n'y a presque que Barbara, la fiancée de Pablo, qui paraisse avoir une certaine humanité, une certaine "normalité".

Le style est agréable et accessible. La trame est au final plutôt complexe. Il y a pas mal de petites histoires parallèles qui finalement n'amènent pas grand chose de plus à l'intrigue mais contribuent à l'ambiance. Sauf que l'on se demande parfois en cours de lecture comment tout cela va bien pouvoir finir par se recouper... Et bien cela ne se recoupe pas ! Ce sont des vies parallèles, des détails qui éloignent des chemins.
Ne cherchez pas non plus vraiment le coté enquête que l'on peut retrouver dans un polar. Il n'y en a pas réellement. Il y a des évènements qui se produisent, qui en induisent d'autres, et d'autres encore, et c'est tout cela qui va faire avancer l'histoire. Ne cherchez pas la logique cartésienne qui sous-tend toute chose.
La solution est folle, et c'est probablement ce qui fait que malgré toutes ces difficultés, on ne peut s'empêcher de penser que l'auteur a fait quelque chose de bien. D'inéluctable, mais de bien.