Alain Lamare a vingt-deux ans. Jeune homme strict, presque maniaque, il ne vit qu'au travers de son métier de gendarme. Il nourrit pour cette fonction une véritable adoration et est complètement révolté par cette "guerre des polices" qui s'est instaurée, et par le laxisme évident de certains de ses camarades. C'est intolérable ! La police dans sa globalité a déjà suffisamment été impactée par l'épopée meurtrière de Marcel Barbeault, le premier tueur de l'Oise. Alain Lamare est introverti, effacé. Même dans sa famille, chez ses parents où il se rend à chaque permission, il n'est pas reconnu. Il ne rêve que d'être comme son frère François. C'est quelqu'un lui ! C'est d'ailleurs le premier, le seul même, qui aura des soupçons sur la véritable nature de son jeune frère.
Yvan Stefanovitch est journaliste. Cette enquête lui aura demandé trois ans de travail. Trois ans pour faire resurgir une histoire vieille de presque quarante ans, et que beaucoup préféreraient oublier. Trois ans pour entrer dans la tête d'Alain Lamare, le connaitre et peut-être essayer de le comprendre.
On n'aborde pas une histoire vraie comme on aborde un polar traditionnel. Plus ou moins consciemment, on y cherche soit une justification aux actes odieux commis, soit une trace de folie, quelque part un peu rassurante. Ici, nous n'aurons vraiment ni l'un ni l'autre. Et l'on sent et l'on comprend par là même beaucoup mieux le malaise qui a dû s'emparer des gendarmes de l'Oise au lendemain de l'arrestation d'Alain Lamare. Pas de suspense ici, pas vraiment de rebondissements puisque nous savons dès le départ qui tue, pourquoi et en quelles circonstances.
L'élément capital est la trajectoire psychologique du jeune homme, et c'est avec beaucoup de finesse et de subtilité qu'elle est ici abordée.
L'écriture reste, malgré la difficulté du sujet, assez légère. C'est fluide et le récit se déroule d'une traite. J'aime assez l'aspect un peu romancé de cet ouvrage, qui lui évite l'écueil de la compilation de données et facilite beaucoup la lecture.
Un ouvrage agréable à lire, qui dérange un peu certes par l'universalité de son sujet... Alain Lamare pourrait tout aussi bien être votre voisin... mais qui vous fera passer un bon moment de lecture.