Félicité n'a que quelques années lorsque pour la première fois, elle voit la reine régente Prudence. Et pourtant, c'est cette rencontre qui décidera de la vie et de l'avenir de la petite fille, ainsi que de la lignée des Loinvoyant. Beaucoup l'ont dit en ce jour, le nom de la petite reine n'a pas été correctement scellé. Et force est de constater que la jeune demoiselle est tout sauf prudente. Et ses parents, le Roi et la Reine lui passent tous ses caprices. C'est ainsi que Félicité pourra rester auprès de la jeune dame alors même que l'office de sa mère étant terminé, la petite fille aurait du rentrer chez elle. C'est ainsi qu'elle grandira auprès de Prudence, nourrissant pour elle un amour fraternel inconditionnel. C'est aussi cet amour là, source de jalousie et ajouté aux conseils perfides de sa mère, qui scellera le destin des deux jeunes femmes.
A ceux qui pensaient que Robin Hobb en avait fini avec L'assassin royal et la famille Loinvoyant, il faudra se raviser. Il était pourtant bien difficile d'imaginer que l'auteur puisse encore en ajouter à ce cycle déjà très complet.
Ce petit ouvrage qui constitue un prélude à la série, est consacré à de nouveaux personnages. L'ambiance est parfaitement conforme au reste de luvre, et aucune incohérence n'est à relever (ce qui n'est pas toujours le cas avec les uvres "rétroactives"). Dès les premières lignes, la magie fonctionne et nous sommes transportés à Castelcerf, au beau milieu de la vie du château.
Comme dans chacun des volumes suivants et malgré la petitesse de cet opus, les personnages sont très travaillés. Félicité est particulièrement complexe, mais les autres ne sont pas en reste. Au final, et contrairement à ce qu'il pourrait paraitre au départ, la Reine Prudence est certaine la plus simple à déchiffrer. Toujours aussi ce côté bassement humain, la lutte intérieure, que chacun porte en soi entre sa part sombre et sa part de lumière.
Comme d'habitude également, l'histoire coule d'elle-même, portée par un style simple et efficace. L'option du récit est particulièrement intéressante ici, car, non seulement elle justifie certains raccourcis et donc aussi le coté court du texte, mais également car elle apporte une sorte d'inéluctabilité qui est assez saisissante.
Le gros plus pour moi ici, est que l'on prend enfin toute la mesure de ce qu'est le vif et surtout de pourquoi être vifier était tellement déshonorant. L'histoire du Roi Pie est l'histoire du vif, celle de la jalousie et du traitement de la différence. Sortie de son contexte, cette histoire est encore une fois d'une actualité navrante.
Voilà un joli tour de passe passe réalisé par l'auteur. Si je m'attendais à quelque chose de bien, j'avoue avoir été malgré tout agréablement surprise. Ce petit prélude m'a donné envie de relire les premiers tomes... peut-être les verrai-je sous un nouvel éclairage !