Il y a des siècles sont apparues les Portes de Vangk, permettant aux vaisseaux spatiaux de se déplacer à travers l'espace. Ravis de cette aubaine, les Humains ont un jour déchanté : du jour au lendemain, les Portes se sont toutes orientées dans la même direction, piégeant les voyageurs sur Omale, avant de disparaître définitivement.
Omale est un monde artificiel : une sphère creuse aux dimensions gigantesques, entourant un soleil. Sa surface intérieure a été aménagée avec une végétation et des animaux terriens. Les Humains piégés ont donc commencé une nouvelle vie... en présence de nouveaux voisins : les Chiles et les Hodgqins, mais aussi les Æzirs vivant dans l'aither, qui ont subi la même mésaventure. Les heurts ont été immédiats entre les différentes rehs, chacune persuadée d'être meilleure que les autres et prétendant à la maîtrise de l'espace vital...
Le premier tome de l'intégrale consacrée à cet univers inclut deux romans. Dans le premier, Omale, seize siècles ont passé et les rehs ont atteint un équilibre plus ou moins paisible, même si elles se mélangent peu. La technologie a régressé, le passé a été oublié, la croyance la plus répandue voulant qu'Omale soit un disque plat et infini. C'est dans ce contexte que plusieurs individus embarquent pour un voyage sur une nef chile. Leur point commun : tous ont reçu de manière mystérieuse un billet avec l'assurance qu'ils trouveront "ce qu'ils cherchent". Des billets émis voilà plusieurs décennies... Qu'est-ce qui les attend à l'arrivée ?
C'est un univers très riche qu'a imaginé ici Laurent Genefort. Si les motifs des Vangk nous resteront mystérieux, nous découvrons les descendants des colons forcés, qui ont créé de nouvelles civilisations. Histoire, géographie, faune et flore, religion, sans compter les spécificités des différentes rehs, c'est un monde neuf à découvrir entièrement. Au début, ça fait beaucoup pour le lecteur : il faut surnager ou couler, voire comme moi se résoudre à continuer sans saisir tous les détails faute d'avoir assimilé toutes les explications sur le physique des non Humains ou les correspondances d'unités de mesure.
Nous suivons au jour le jour le voyage mouvementé des "invités". Ils appartiennent à différentes races, ont un passé très différent, et ne peuvent que s'interroger : pourquoi ont-ils été réunis ? sur quels critères ? Chacun est intéressant à sa façon, même si évidemment certains sont plus sympathiques et attachants que d'autres.
Malgré des longueurs certaines, l'histoire est plaisante, plus par la force de cet univers que par l'action elle-même, finalement peu prenante. A mon goût, le final n'était pas à la hauteur du mystère soulevé tout au long du roman : "tout ça pour ça ?", ai-je finalement pensé.
Le deuxième roman fait un retour dans le passé par rapport au premier, se déroulant plusieurs siècles avant, alors que les guerres inter-espèces dont rage. Cette histoire-ci est plus vivante, plus prenante. Probablement parce que l'on a déjà assimilé les règles de cet univers si particulier, mais aussi parce qu'il n'y a pas une seule trame mais plusieurs entremêlées.
Un commando d'élite humain est chargé d'une mission ultra-secrète mais également décisive, qui devrait changer le cours de la guerre éternelle menée contre les Chiles. Comment on ne le sait pas et nous ne le découvrirons que tout à la fin ! C'est le fil principal du roman, le récit que nous suivons le plus.
Au Terminal, des délégations des trois rehs terriennes préparent un événement qui ne survient que tous les vingt-six ans : la visite d'un émissaire de la reh de l'aither, cette reh qui fournit les précieux métaux lourds absents de la surface d'Omale. Mais que mijote donc le chef des Humains ?
Ailleurs encore, un groupe de scientifiques cherche à établir une carte. Mais leur progression a été entravée par une chape de nuit progressant à grande vitesse, qui les a englués dans une nuit éternelle mortellement froide à laquelle rien ne survit ou presque...
Les trois récits n'ont pas grand chose en commun, si ce n'est le fait qu'ils se déroulent au même moment, c'est à dire à l'orée de la fameuse "Guerre des Météores" évoquée dans le roman précédent. Leur échelle de temps n'est pas le même, ce qui est assez difficile à suivre : tandis que la quête des militaires et celle des scientifiques s'étale sur de longs mois, les épisodes à Terminal ne concernent qu'une poignée de jours ! J'avoue avoir été un peu déçue que les trois histoires ne se rejoignent pas pour de bon à la fin.
On peut noter également des thèmes de fond : la guerre et ses fondements, la difficulté de commander et de prendre des décisions dont les conséquences engageront des milliers ou des des millions de vies, etc.
Ce roman permet de mieux appréhender l'immensité d'Omale : rien que la Grand'Aire connue et occupée est si démesurée que les nouvelles mettent des vies humaines à la traverser ! On le voit notamment avec le voyage de la mission militaire, qui se heurte à nombre de problèmes dus au fait que les informations dont ils disposent sont périmées depuis des dizaines d'années, ou que l'urgence militaire est de bien moindre portée lorsque l'on est à des dizaines de milliers de kilomètres du front !
Sinon, c'est encore une fois l'occasion de rentrer dans le détail de cet univers si foisonnant que nous propose l'auteur. Dommage seulement que ce soit surtout centré sur les Humains et que l'on ait si peu d'opportunités de voir le monde à travers les yeux (ou les globes oculaires) des autres rehs.
S'il y a plus d'action et de rebondissements que dans le premier roman, j'ai malgré tout eu plus de mal à le terminer. C'est vraiment très long, et quand je suis arrivée à la fin du bon millier de pages que comporte ce premier volume de l'intégrale, j'étais proche de l'overdose : il va me falloir attendre un peu avant d'être prête à assimiler la suite, qui s'annonce un pavé tout aussi volumineux. Peut-être aurait-il mieux valu que je le lise à petite dose, avec une pause entre les deux romans.
En tout état de cause, c'est un univers particulièrement fouillé qui intéressera tous les amateurs du genre. A découvrir !
