Conservatrice d'un musée, la discrète Ophélie a une vie tranquille à souhaits qui lui convient parfaitement. Elle a déjà refusé d'épouser deux cousins, mais est contrainte d'accepter les fiançailles imposées par les Doyennes : un homme d'une autre Arche, pas moins ! Ophélie devra donc quitter Anima pour suivre Thorn au Pôle, une Arche glacée aux mœurs très différentes. Et son fiancé n'est pas moins glacial que l'environnement...
Le monde dans lequel nous plongeons est saisissant, à l'image de la Citacielle, la capitale flottante du Pôle brillamment illustrée sur le couverture de l'ouvrage par Laurent Gapaillard. Les gens habitent des Arches, de grandes cités isolées les unes des autres, dirigées par des "esprits de famille" immortels. Chacune d'entre elles a ses particularités. Ainsi, à Anima, la Famille d'Ophélie a des talents pour animer des objets, comme ce coche qui avance sans cheval ou la sympathique écharpe qu'Ophélie ne quitte guère... Ophélie est également une liseuse, capable de connaître le passé des objets par un simple contact. Au Pôle, c'est plus compliqué et les descendants de l'esprit de famille ont créé des branches divergentes aux pouvoirs très différents, mais tous impressionnants.
Mais ce qui va surtout dépayser la provinciale Ophélie à son arrivée au Pôle, c'est la situation politique complexe, mortellement dangereuse. Les clans complotent les uns contre les autres, et il ne faut se fier à rien ni personne. La jeune femme est brinquebalée à droite et à gauche par sa future belle-famille sans que personne ne daigne lui révéler le pourquoi de tous les secrets qui l'entourent. Pauvre Ophélie, pas du tout préparée à plonger dans ce nœud de vipères !
Ophélie est immédiatement attachante : insignifiante, maladroite, mal fagotée, elle part avec bien peu d'atouts. Et pourtant, elle est plus forte qu'il n'y paraît et va surmonter bravement les difficultés.
Face à elle, son fiancé est de prime abord bien rébarbatif, c'est un colosse autoritaire et froid, qui décourage toute tentative de rapprochement : "L'Intendant n'aime personne et personne n'aime l'Intendant". Pourtant, on le devine plus sensible qu'il n'y paraît, peu à peu touché - même s'il ne le montre guère - par cette petite fiancée qui a si peu sa place dans son monde...
Amateurs de romances, attention : les doux sentiments, ce n'est clairement pas pour tout de suite. Pour le moment, c'est plutôt méfiance et regards en coin !
Le rythme est bon, la plume agréable, nous entraînant sans coup férir à la suite d'Ophélie qui découvre avec effarement son nouveau monde. L'intrigue est complexe (mais pas difficile à suivre pour autant, rassurez-vous) et ne se dévoile pas encore en totalité : les éléments nous ont été présentés, reste à savoir comment ils vont s'assembler. Ce qui nous amène à mon seul regret concernant cet ouvrage : la fin arrive bien abruptement, nous laissant sur notre faim dans l'attente de découvrir ce qu'il va advenir d'Ophélie. Vite, la suite !
C'est grâce au Département de l'Hérault que j'ai eu l'occasion de découvrir cet excellent roman. En effet, il a su convaincre les jeunes jurés du prix littéraire des collégiens de l'Hérault 2014, et a en conséquence été offert par le Département à tous les collèges et toutes les médiathèques locales. Belle initiative de mettre ainsi à disposition des enfants des livres de qualité !
Ce roman saura séduire sans souci les lecteurs à partir de douze ans, mais également les adultes. Il ne me reste plus qu'à souhaiter à Christelle Dabos, nouvelle auteure prometteuse révélée par le concours du Premier roman jeunesse 2012, tout le succès qu'elle mérite.