Les Chroniques de l'Imaginaire

Béton armé - Rahmy, Philippe

Invité en résidence par l'association des écrivains de Shangaï, Philippe Rahmy se lance dans ce voyage comme dans le paradoxe de sa vie. Atteint de la maladie des os de verre, il est fragilisé dans son corps, ce qui a sans doute pour effet quasi direct de le libérer dans sa tête. Ce voyage à Shangaï, il le vit presque comme une agression désirée, comme la douceur d'une morsure. Il le vit avec toute la violence que son corps, tout autant que son intellect, lui permettent.

Notons en préambule que cet ouvrage a reçu la Mention Spéciale du jury du Prix Wepler-Fondation La Poste, le 11 novembre 2013. Une bonne base donc, qui ajoutée au titre et à la quatrième de couverture n'ont pas manqué de piquer mon intérêt.

La préface de Jean-Christophe Rufin a confirmé cette sensation et accru l'impatience que je pouvais avoir à plonger dans ce livre. Le soufflé est malheureusement retombé assez rapidement.

Je ne remets pas en cause la plume de l'auteur, ni sa propension à exprimer un sentiment, bien au contraire. C'est même peut-être en partie à cause de cette capacité que, pour moi, cela n'a pas fonctionné. A cause plus précisément de cette "ultra" capacité. On comprend rapidement que Philippe Rahmy a voulu nous faire ressentir, au delà de la ville en elle même, la sensation de chaos que cette ville provoquait chez lui. Chaos dans ses émotions, dans sa conception du beau, du bonheur, le tout lié à une remise en question quasi permanente et presque naturelle, au point qu'elle n'est finalement qu’effleurée. Il y parvient tellement bien que ce chaos m'a submergée.

Je n'ai probablement pas su saisir la bouée que d'autres ont attrapée en début d'ouvrage, et le rythme imposé par ce récit m'a totalement désorientée. Les respirations ménagées par les flash-back sur son passé m'ont permis de reprendre mon souffle et de terminer cette lecture, mais aussi d'apprécier les véritables qualités de plume de l'auteur. Pari raté ? Non, pas du tout à mon sens. Mon émotion est plutôt négative, il est vrai, mais elle est intense. Ma sensibilité ne correspond pas à ce que j'ai éprouvé lors de cette lecture, mais j'imagine aisément à quel point elle peut être inverse, si l'on embarque aux premières lignes. J'en garde tout de même l'envie de mieux connaitre cet auteur, dont certaines envolées m'ont marquée.