Tout au nord de la Norvège, en Laponie, différentes communautés cohabitent à Hammerfest, la ville la plus septentrionale du monde. Il y a le peuple sami, les travailleurs du pétrole et les habitants sédentarisés. Tout ce monde vit au rythme de journées très froides et très courtes, ou raisonnablement froides mais très longues.
Klemet et Nina font partie de la police des rennes. Ils doivent s'assurer que les éleveurs puissent faire leur travail correctement sans empiéter sur le territoire des citadins, en d'autres termes en évitant que les rennes ne viennent se promener dans les rues de la ville. Mais au printemps, c'est le temps de la transhumance, et parmi les sami c'est à qui aura le premier le meilleur pâturage pour ses bêtes. Klemet et Nina ont fort à faire, surtout cette dernière qui peine encore à s'habituer aux nuits ensoleillées de cette partie du monde.
Leur travail est rendu encore plus difficile par le décès d'un des éleveurs, un jeune homme plein de promesses qui avait étudié l'art de l'élevage à l'école et qui s'est noyé en voulant faire passer les rennes dans le détroit du loup. L'enquête ne devrait pas être du ressort des deux collègues, qui ne peuvent pourtant empêcher leur instinct policier de douter d'un simple accident. Et si le jeune éleveur avait été tué ?
C'est le début d'un travail de fourmi pour Klemet et Nina. Il faudra interroger les sami pour comprendre ce qui se jouait dans le détroit. Et puis il y a ces plongeurs, qui risquent leur vie à chaque descente pour l'industrie pétrolifère.
Vivant en Scandinavie depuis vingt ans en tant que correspondant pour le journal Le Monde, Olivier Truc connait bien son sujet. Cet opus permet de fournir un cadre détaillé et évocateur de ce que peut être la vie dans le grand Nord lapon. Un mode de vie aux antipodes de ce que nous connaissons où le crime a pour autant aussi sa place. Il permet aussi de relater les conditions de travail et même d'exploitation des plongeurs, qui ont pour beaucoup subi des séquelles dramatiques. La mise en route de l'intrigue est un peu longue, tout ne s'emballe véritablement qu'au cours des 150 dernières pages. On retiendra surtout l'atmosphère qui se dégage de l'ensemble, la description de moeurs et d'états d'esprit intrinsèques à ces contrées isolées, ainsi que le rôle troublant des plongeurs.
Le détroit du Loup a le mérite de procurer un plaisir doublé à la lecture : celui du divertissement et celui de la connaissance. A retenir, donc.