Quelque part dans un village des Hautes-Alpes, de nos jours... Paul Durand, le tenancier de l'hôtel du village, passe un bien étrange coup de fil à une jeune femme de Nice du nom d'Anna Laurens. La jeune femme en question est d'abord choquée, puis curieuse, d'apprendre qu'un colis est adressé à sa défunte mère, Alice Laurens. Un colis qui a tout d'un héritage, de la part d'un certain Dover Winston Smith...
Alors, la jeune femme fait le déplacement depuis Nice pour récupérer les affaires en question, au risque de passer pour la curiosité de ce village montagnard. Anna arrive en plein boum, et se perd bientôt dans la lecture du journal tenu par ce fameux Smith, et adressé à Alice Laurens, que l'homme a apparemment plus que bien connu...
Rapidement, la lecture happe littéralement la jeune femme (et le lecteur de ce premier tome !), qui plonge dans l'enfance de ce Dover, et notamment ses déboires avec ses camarades, en milieu scolaire. Les enfants ne sont pas tendres, entre eux, et Dover l'aura appris à ses dépends... Systématiquement la proie de garçons plus forts que lui, le garçon ne trouvait de répit que dans les études, sa mère, et la jeune femme du directeur de l'établissement, une femme qui est sur le point de changer sa vie.
Cela se passe de nuit, en hiver : Dover et un de ses camarades se rendent chez le directeur afin de se venger d'une injuste punition. Mais les choses tourneront très mal, avec une chute dans les escaliers de la femme de ce dernier, enceinte qui plus est, laissée pour morte par les deux enfants impuissants... Un épisode qui aurait pu être dramatique, mais qui ne fera heureusement pas de victime, si ce n'est dans le conscient de Dover. Le jeune homme parviendra à rebondir, et à être notamment accepté dans une des plus prestigieuses écoles d'Angleterre...
Ce premier tome de Une vie : la biographie retrouvée est de toute beauté. On le doit notamment à une lecture de Christian Perrissin, tombé par hasard sur la vraie biographie du personnage dont il est question ici. Un personnage qui a donc réellement existé, et qui a vécu une vie d'explorateur n'ayant rien à envier à un Ernest Hemingway...
Ici, c'est donc l'enfance difficile de Winston Smith qui est dépeinte, avec un récit fort à propos qui a lieu dans deux époques différentes : une technique narrative qui a fait ses preuves dans le neuvième art, et qui est, il faut bien le dire, parfaitement adaptée ici.
Les dessins de Guillaume Martinez (à qui l'on doit Le monde de Lucie et Motherfucker chez le même éditeur) sont eux aussi de toute beauté. Les visages, expressifs à souhait, sont totalement crédibles et immersifs, et le personnage de Winston enfant est totalement attachant : un excellent point pour s'y intéresser de près. Les plans sont pour certains audacieux et parfaitement réussis, allant de la tranche de vie à certaines scènes à la tension palpable.
Un premier tome qui est une totale réussite, au scénario parfaitement maîtrisé, et rappelant les meilleures séries d'un auteur comme Luc Brunschwig : du grand art à se procurer absolument !