La revue québécoise nous propose un numéro spécial sur la liberté d'expression. Cela commence par une couverture très réussie, puisque les mots "Liberté d'expression" sont difficiles à déchiffrer, cachés derrière des barreaux de prison.
On est tout de suite dans le bain !
Cinq nouvelles illustrent ce douloureux sujet.
Ravaler ses mots de Jean-Jacques Pelletier
Un journaliste polémiste et fouteur de m... est retrouvé mort dans son bureau, étouffé par des feuilles de papier journal empoisonnées. Il est clair qu'on a voulu le faire taire. Mais pourquoi ? Et qui ?
C'est un policier non loin de la retraite, Dufaux, qui va résoudre brillamment l'énigme.
Superbement racontée, cette longue nouvelle est très rythmée, très agréable, très bien menée. Elle inaugure de façon tout à fait réussie ce numéro spécial. A noter, une très belle introduction.
C'est ma préférée de ce numéro.
Le prix du désir de Martine Latulippe
Une très courte nouvelle, mais très bien écrite, racontant la façon dont la liberté d'expression d'un personnage politique peut être très facilement muselée.
Percutant et efficace.
Au pays du dirigeant Bien-Aimé de Geneviève Blouin
Dans ce pays où les gens ont faim et froid, malgré les tickets de rationnement, un écrivain dÉtat attend impatiemment de savoir si son dernier roman va être accepté par la censure.
La nouvelle est courte mais l'auteure réussit parfaitement à retranscrire l'oppression quotidienne des habitants de ce pays, l'angoisse du quotidien, le fossé immense entre la face que l'on présente aux touristes et aux journalistes venus d'ailleurs, et la réalité.
Une parfaite illustration du thème de ce numéro.
Le monde selon Hämmerli de Richard Ste-Marie
Le tueur à gages cher à l'auteur réfléchit et nous fait part de ses réflexions avec une pointe d'humour bien agréable dans ce contexte étouffant et oppressant.
Liberté d'oppression de Hugues Morin
Un journaliste a disparu. Mais il se savait en danger et a envoyé à plusieurs personnes de son entourage des mails, des dossiers, expliquant les dossiers plus que chauds sur lesquels il était en train d'enquêter et qui lui ont certainement coûté la vie. Corruption, traîtrise, abus de biens sociaux, toutes les formes de la criminalité en col blanc sont expliquées.
Avec les vrais noms de vrais personnages ayant trempé (ou trempant actuellement) dans des affaires louches, avec de véritables situations politiques actuelles.
Est-ce vraiment à proprement parler une nouvelle, une fiction ? Je n'en ai pas eu l'impression. Annoncé pourtant comme une nouvelle, cet écrit ressemble plutôt à un long éditorial condamnant tous les hommes de pouvoir.
Cela m'a laissée perplexe, et l'enthousiasme généré par la première nouvelle de la revue est retombé comme un soufflé.
Plus insidieux que la répression de Jean-Jacques Pelletier
L'auteur habitué du thème et de tous les thèmes tournant autour de la répression, la manipulation, traite ici du sujet de la liberté d'expression sous toutes ses formes. Bien sûr, les attentats du 7 janvier 2015 à Paris sont évoqués (tout comme dans plusieurs des nouvelles de ce numéro). Les arguments sonnent justes et les différentes démonstrations font froid dans le dos.
Mais forcément, l'ensemble est sombre et laisse peu d'espoir en l'humanité. Déprimant.
La censure de Richard Ste-Marie
Plus court que le précédent, cet article traite de la censure, en s'intéressant aussi aux traducteurs qu'il considère à juste titre comme de véritables auteurs. Intéressant et moins déprimant que le précédent.
Conversation avec Emile Martel de Pascale Raud
Emile Martel est le président du P.E.N. Québec. Qu'est-ce que le P.E.N. ? Il m'a fallu étudier attentivement la reproduction d'une affiche illustrant l'article pour trouver la signification de ces trois lettres car à aucun moment cet acronyme n'est expliqué et je trouve cela bien dommage !
P pour Poésie ou Poètes, E pour Essayistes et N pour "Novelists" (romanciers), cela symbolise l'ensemble des métiers de l'écrit fictionnel. Le P.E.N est un organisme luttant surtout contre la censure, et militant activement pour la liberté d'expression.
Son président s'étend longuement sur leurs actions, les différents courants, les autres P.E.N existant dans le monde.
C'est instructif, mais parfois un peu longuet.