Les Chroniques de l'Imaginaire

Roi du Matin, Reine du Jour - McDonald, Ian

C'est dans un univers bien étrange que nous transporte McDonald avec ce roman un peu particulier.
Il est composé de trois parties, dans lesquelles nous suivons à chaque fois une femme différente, à une époque différente, mais ayant tout de même des liens entre elles trois.

La première partie, Craigdarragh, raconte l'histoire d'une adolescente, Emily, juste avant la Première Guerre Mondiale, en Irlande. Cela se présente sous la forme de journal intime, de courriers échangés entre divers personnages.
Son père est un savant un peu fou, passionné de sciences et d'astronomie. Il découvre quelque chose d'étrange sur une comète et est persuadé que ce sont des extraterrestres qui veulent communiquer avec nous.
Emily, de son côté, commence à voir des fées et des personnages étranges dans le jardin et dans les bois environnant leur belle demeure.
Au départ, ce sont quelques fées, quelques petits détails, puis les visions et les situations étranges vont crescendo et cela devient de plus en plus étrange, de plus en plus extraordinaire et féerique.

Cette première partie est très agréable à lire. L'écriture de McDonald est puissante, très riche, onirique, à la limite parfois de la poésie. On est immédiatement plongé dans un monde un peu féerique, plein de magie, mais en même temps si terre à terre et pragmatique avec le père qui s'obstine dans son idée de communication avec d'autres êtres vivants.
La fin de cette partie nous laisse sans réponse, avec au contraire bien des questions en suspens.

La deuxième partie, Le front des mythes, se passe deux décennies plus tard, toujours en Irlande. On suit l'histoire de Jessica. La narration se fait alors sous la forme classique, plus de journal intime ni de courrier.
Jessica est une adolescente qui a une forte imagination. Elle en use et en abuse en racontant à ses amies des histoires complètement folles, mais très détaillées, et paraissant vraies. Son père décide de l'envoyer consulter un psychiatre pour diverses raisons.
Ce psychiatre va utiliser l'hypnose pour savoir ce qui rend Jessica si différente des adolescents de l'époque. Sous hypnose, il va alors découvrir des choses bien étranges.
Et lorsque ses fameuses histoires inventées se réalisent toutes, elle commence à comprendre que quelque chose de pas normal se passe.

Là encore, on a une histoire très agréable à lire, à l'écriture toujours aussi puissante.On commence à entrevoir des réponses, à comprendre les liens entre les deux premières parties.

La troisième et dernière partie, Shekinah, raconte l'histoire d'une jeune femme, Enye. On est toujours en Irlande, vingt ans plus tard.
Enye mène une vie apparemment normale, mais on est très vite plongé dans sa réalité : elle doit combattre des monstres qu'elle seule peut voir. Elle les élimine à l'aide de sabres et de dagues.

Cette partie, toujours très bien écrite, à la puissance encore plus évocatrice que lors des deux premières parties, est pourtant celle qui m'a le moins plu. Cela devient en effet compliqué de comprendre. Les chapitres s'enchainent sur une échelle de temps que l'on ne maîtrise plus. Est-on dans son présent, son passé, son futur ? On ne le sait pas toujours.
Les actions s'enchainent à une vitesse folle, on est pris dans un tourbillon de scènes toutes plus étranges les unes que les autres. Cette partie est aussi la plus longue et on n'a au final pas toutes les explications que l'on espérait.

Dans son très court épilogue, l'auteur explique pourquoi il a fait trois parties. Si la troisième partie avait été aussi passionnante (bien qu'elle soit passionnée, c'est indéniable !) que les deux premières, ce roman aurait été un véritable coup de coeur.
Il n'en est pas moins vraiment excellent, on passe un très bon moment de lecture, un peu hors du temps, plein de poésie, emporté par les mots et les phrases si bien ciselées de McDonald.