Les Chroniques de l'Imaginaire

Jours parfaits - Montes, Raphael

Téo est étudiant en médecine. Sa spécialité ? La médecine légale. Téo n'est pas un étudiant tout à fait comme les autres. Il est seul, toujours seul. Sa meilleure amie est l'un des spécimens qu'ils étudient en cours, un cadavre qu'il a surnommé Gertrude. Téo ne ressent rien pour personne, mais il a appris à faire illusion, parfaitement conscient de ne pas répondre à une certaine normalité. Il ne s'est jamais intéressé aux filles non plus. De toute façon, il ne saurait pas les aimer...

Et puis Téo va croiser Clarice, en tout son opposé. De cette brève rencontre va naître une folle obsession, une passion morbide. Mais Clarice, aux mœurs si dramatiquement déplacées, s'apprête à mettre les voiles pour plusieurs mois, et cela, Téo ne peut le tolérer. Il se l'est juré : Clarice sera à lui, et rien ne pourra les séparer...

Comment exprimer cette sensation de malaise qui subsiste en refermant le livre ?

Comment, si ce n'est par le simple constat que l'écriture de Raphael Montes a été particulièrement efficace. Il est absolument indéniable que la construction des personnages a été particulièrement réfléchie et travaillée, puisque finalement toute la structure de l’œuvre repose dessus. Clarice d'abord regroupe tous les clichés de la jeune bobo rebelle et qui se cherche, en totale rupture avec l'image familiale dans laquelle elle a grandi. Un peu caricatural ? Peut être, mais tellement bien fait...

Téo ensuite, et il s'agissait là d'un préalable indispensable à la "réussite" de l'expérience, est un petit bijou de précision. Bien des termes pourraient être employés pour le décrire, mais sociopathe semble être celui qui lui collerait le plus à la peau. Et encore... On ne peut pas dire non plus qu'il ait une indifférence totale vis à vis des normes, des codes... A minima, il obéit aux siens, à ceux qu'il a choisis.
Cette caractéristique aurait facilement pu faire tomber ce livre dans la vulgarisation, dans le concept facile et transposable à souhait. Mais ce n'est pas le cas, tant les différents éléments de la personnalité du jeune homme ont été pesés avec justesse.

L'histoire ensuite répond à un rythme très agréable. Ni trop intense, ni trop léger. On rentre très vite dans le vif du sujet, et on capte dès les premières lignes les spécificités du personnage principal, juste pour nous donner envie d'aller plus loin.

Conduire cette histoire un peu à la façon d'un road movie a aussi été une grande idée. Cela a facilement permis à l'auteur d'avancer, et de ne pas tourner en rond, tout en conférant assez naturellement une certaine fluidité au déroulement des choses.

Cette manière aussi d'exposer la nature humaine et de la disséquer d'une certaine façon est assez troublante. Peut-être finalement que tout le monde pourrait bien être capable de tout...

Et puis cette fin.... Sans vouloir trop en dévoiler, c'est certainement aussi le plus troublant. Pas tant dans les faits, mais parce que cela m'a personnellement renvoyée à une partie de moi-même que je ne connaissais peut-être pas si bien que ça. D'où le malaise aussi dont je parlais au départ. Le constat est simple, nous répondons tous à des normes, qu'elles soient marginales ou communément sociétales. Voir quelqu'un les distordre ainsi est bien plus perturbant que l'on pourrait le penser.

A lire donc, sans à priori, et en se laissant porter !