Les Chroniques de l'Imaginaire

Solaris (Solaris - 198)

La belle couverture signée Emilie Léger ouvre sur un contenu dense et tout à fait intéressant à lire. Pour commencer par les fictions :

K**l me, I'm Famous, de Eric Holstein : Une star du rock en devenir, Nick, rencontre Bella, qui a été l'égérie de plusieurs anciennes stars du genre. Coup de foudre ? Voire...
C'est un plaisir de retrouver la plume de l'auteur, qui n'a visiblement rien perdu de sa capacité à produire de belles images et des personnages cohérents. Même si le thème n'est pas d'une originalité transcendante, il est traité de superbe manière, et cette belle nouvelle est l'une de mes préférées.

Le choix des âmes, de Daniel Birnbaum : Jimmy et Jane travaillent tous deux dans un labo de recherche visant à prouver l'existence de l'âme. L'histoire commence au moment où ils apprennent s'être fait doubler par une équipe sud-africaine.
Contrairement à la précédente, cette nouvelle a un thème plutôt original, et comme pour la précédente, celui-ci est bien traité, ce qui en fait une lecture tout à fait plaisante.

Elle, de Jérémie Bourdages-Duclot : On a beau être sex-addict, quand on croise une femme aux yeux d'or et à la longue chevelure noire, on serait presque prêt à virer monogame.
Cette nouvelle re-visite sous une forme actuelle le fantasme de la femme castratrice. J'ai été un poil déçue par la fin, mais elle n'en est pas moins bien écrite et très agréable à lire.

Prestance, de Samuel Lapierre : Veuf, le narrateur tombe amoureux de la jolie Prestance. Malheureusement, si ses moyens lui permettent l'acquisition de son corps de déesse, il ne peut lui fournir qu'un cerveau (comprenez : une I.A.) de seconde main. Et c'est là que les ennuis commencent.
Dans cette nouvelle, l'auteur évoque non sans talent l'ombre de la créature de Frankenstein, et toute femme ne peut qu'apprécier la morale qui critique que pour un homme le châssis ait plus d'importance que le moteur... mais je m'égare ! Quoi qu'il en soit, l'auteur réussit à évoquer sous une forme de nouvelle un monde crédible, ce qui suffit sans doute à expliquer qu'elle m'ait paru longuette. C'est néanmoins un nom d'auteur à retenir.

Tempus fugit, de Mario Tessier : Qu'est-il donc arrivé à Kruger ? Le biochimiste en poste sur Trakis semblait pourtant fiable et compétent... avant de sombrer dans l'alcool. Quoi qu'il en soit, il est temps de reprendre son étude de larrea fractalis incorruptam.
En plus de son activité de Futurible, Mario Tessier est un nouvelliste toujours intéressant. Cette nouvelle, étincelante et pleine d'humour, ne fait pas exception. C'est sans conteste l'une de mes préférées, pour son originalité et son ton ironique, dans ce numéro de la revue.

Dans ses Carnets du Futurible, consacrés cette fois aux plus vieux organismes vivants, Mario Tessier fait un tour d'horizon spatio-temporel ébouriffant, couplé avec un ardent plaidoyer écologique. J'ai néanmoins relevé une assimilation gênante, page 94 ("Des animaux plus imposants, comme les baleines et les tortues, font eux aussi partie des mammifères super-centenaires") et dans l'encadré I : depuis quand les tortues sont-elles des mammifères ?!

Dans son article intitulé Lâcheté, paresse et ironie : comment la science-fiction a perdu le futur, Jonathan McCalmont fustige la déconnexion des auteurs contemporains de SF d'avec la politique et la science actuelles. Il s'agit d'un article en deux parties, dont celle-ci n'est donc que la première, et je lirai avec intérêt la seconde. C'est d'ores et déjà intéressant, mais je ne suis pas sûre que son auteur ait lu autre chose que des romans parus en anglais. En effet, les œuvres récentes de Jean-Marc Ligny, pour ne citer que lui, représentent un bon contre-exemple de son affirmation.

Comme toujours, Christian Sauvé dans sa rubrique Sci-néma décortique les films parus récemment, et j'y ai trouvé quelques idées tentantes. C'est dire la qualité de sa critique, vu que je ne suis pas cinéphile !

Les Littéranautes m'ont donné envie de lire au moins une publication québécoise, et la bonne appréciation du dernier roman de Clavel, Feuillets de cuivre, dans la partie Lectures m'inspirerait presque l'envie de redonner sa chance à cet ouvrage, que je n'ai pas aimé.

En somme, la lecture de Solaris est toujours questionnante et enrichissante, et il ne faut pas hésiter à le lire.