Cybelle est une manufacture normande qui connaît la gloire depuis le début du siècle. On y crée des sous-vêtements féminins de haute qualité. Cybelle fait vivre Vrainville. Elle est le cœur, le poumon de cette ville où se dessinent le destin de chacun. Au début du roman, nous sommes le 12 juillet 1998, date gravée dans les mémoires où la France sort dans la rue pour fêter la victoire mondiale de ses bleus.
Marie vit à Nancy, elle est une future infirmière et elle a la vie devant elle. Laurent, Patrick et Maxime, eux, sont restés à Vrainville, passent la soirée en boîte de nuit, toujours en tant que meilleurs copains depuis des lustres. William se déhanche sur le dance floor en région parisienne avec sa future femme, mais ne le sait pas encore. Dans le sud de la France, une petite fille est en train de naître et son destin sera forcément lié à Vrainville, elle s'appelle Mélie. Toutes ces personnes vont être les acteurs et les actrices de la destinée de Vrainville avec plus ou moins de chance, voire tragiquement.
Tout va basculer ce soir de juillet 1998. Mais la famille, Lecourt toujours à la tête de la manufacture, dessinera la vie, cachera les secrets, masquera la vérité mais au grand damn de la personnalité et de la vie de certaines personnes.
2015 arrive avec cette mondialisation qu'on connaît bien et qui va chambouler cette tranquillité professionnelle que connaît Vrainville depuis toujours. Vrainville ne sera plus la belle aux sous-vêtements féminins, l'usine de lingerie centenaire à travers laquelle tout le monde vit, celle qui prend soin de ses employées, qui verse les primes en été, qui loge ses salariés fidèles. Non ! Tout est sur le point de s'achever jusqu'à ce qu'il y ait un mort.
Le rouge orangé vif de la couverture nous fait plus penser à un roman violent, voire sanguinolent. De la violence il y en a, mais celle-ci ne se voit pas au premier coup d’œil. C'est la violence actuelle de la mondialisation qui nous bouffe au quotidien, efface le savoir-faire français et emporte notre travail au-delà des continents.
Aussi les faits divers que nous décrit l'auteur Hervé Commère au début du livre correspondent aux pages de nos quotidiens à la rubrique macabre ; viol, alcool, accident sont ce que nous entendons ou lisons tous les matins. Là dans Ce qu'il nous faut c'est un mort, tout y est. L'écriture est sensationnelle. Les descriptifs sont au point, justes et précis. C'est notre quotidien, notre vie de petits Français qui essaient de faire face aux dures réalités de la vie. On s'attache à certains personnages, on déteste les autres même si de temps en temps on ressent une certaine compassion, on hait les violeurs, et on rejette cette pression économique mondiale qui fait que les riches s'engraissent à nouveau et que les petites mains s'éteignent peu à peu.
Travaillant pour une société anglaise dirigé par un fond de pension, le récit des rouages de la mise en place d'un rachat par justement un fond de pension me semble surréaliste en premier lieu mais au final tellement vrai. Et encore, l'auteur ne se cache pas en fin de roman, de nous dire que les méthodes décrites dans son roman sont beaucoup plus douces que dans la réalité. Ou va-t-on ? Dans quel monde économique et professionnel vivront nos enfants, où la rentabilité prend le pas sur l’humain ?
Premier roman dans mes mains d'Hervé Commère, qui s'acharne à nous faire comprendre via les choses complexes de notre existence que la Vie, c'est devant... Je continue à y croire.