Les Chroniques de l'Imaginaire

Cher Mr Darcy - Grange, Amanda

Fitzwilliam Darcy est un jeune homme très fortuné, qui n'aime guère se mêler au commun des mortels qu'il prend avec hauteur. Ayant accompagné son ami Charles Bingley dans le Hertfordshire, son mépris évident lui a aussitôt valu d'être peu apprécié de la bonne société locale. De son point de vue, il n'y a personne de qualité dans ce coin de campagne. Quand il réalise que son ami Bingley est attiré par la douce Jane, il est horrifié car la famille Bennet lui a fait très mauvais effet, et il persuade celui-ci de renoncer à cette mésalliance. Pourtant, lui-même ne peut oublier Elizabeth, la sœur de Jane, qui l'a charmé par son intelligence et sa vivacité, mais aussi le peu de cas qu'elle fait de sa position : vexée par le dédain de Darcy à son égard, Elizabeth nourrit une rancœur sincère envers le jeune homme...

Partant du roman classique Orgueil et Préjugés de Jane Austen, Amanda Grange a imaginé ce que cela aurait pu donner s'il avait été écrit sous un format épistolaire. Elle nous propose donc une version où nous découvrons les événements et les sentiments des protagonistes juste à travers les lettres qu'ils écrivent.
Cet ouvrage pourrait se lire indépendamment de celui dont il est issu, mais il vaut quand même mieux avoir lu au préalable l'original pour apprécier celui-ci. Et si vous ne devez en lire qu'un, il est clair que c'est celui de Jane Austen !

J'ai aimé le fait qu’Amanda Grange, tout en respectant l’histoire et les personnages de Jane Austen, nous propose – avec une certaine part d’invention évidemment – d’en apprendre davantage sur le contexte. Ainsi, les échanges de lettres commencent plusieurs années avant la rencontre entre Darcy et Elizabeth, permettant par exemple de découvrir comment Darcy a endossé ses responsabilités à la mort de son père ou comment est née son amitié avec Bingley.

De plus, il y a une grande multiplicité de points de vue : Darcy et sa famille (sœur, cousin, tante…), les cinq filles Bennet, les filles Lucas, mais aussi l’odieux Wickam par exemple. On peut ainsi approfondir les personnages secondaires, moins mis en avant par Jane Austen, ce qui donne de la consistance. C’est également amusant, car chacun a son caractère, et cela se ressent dans les lettres : Mary Bennet, qui se veut un bas-bleu plus instruit que son entourage, mais se révèle surtout ridicule ; Mr Collins, complètement nigaud et qui répète les opinions de Lady Catherine comme parole d’évangile…

Par contre, je trouve que l’aspect épistolaire n’est pas toujours bien géré. Certaines lettres rentrent dans un niveau de détail inimaginable à l’écrit (par exemple : « je suis arrivé devant sa porte et me suis arrêté un instant pour reprendre contenance », raconte Darcy à la mort de son père). Cela ne colle pas du tout, d’autant qu’au contraire certains passages sont plutôt vite expédiés, et d’autres très artificiels. Bref, on n’a pas l’impression de lettres qui pourraient réellement être échangées dans ces conditions.

Dommage également que LA lettre la plus importante de l’histoire ne soit pas retranscrite. On évoque à plusieurs reprises la lettre remise à Elizabeth par Darcy pour s’expliquer après qu’elle ait refusé sa demande en mariage, mais le lecteur ne pourra pas en profiter. Je suppose que l’auteure n’a pas voulu concurrencer sur ce point le roman dont elle s’est inspirée, mais pour moi (qui ait globalement oublié la plus grande partie de l’œuvre de Jane Austen) cela manque.

Enfin, le rythme est trop lent à mon goût : Que de temps passé par exemple avant que Darcy ne rencontre les Bennet ! C’est long et je me suis un peu ennuyée.

Cet ouvrage qui surfe sur la mode actuelle des austeneries pourra plaire aux vrais fans, mais me semble dispensable pour les autres.