Nous sommes en mai 1945, non loin des côtes canadiennes. Un sous-matin allemand se risque dans le secteur, afin de positionner une balise qui servira de relais pour une opération terrible imaginée par Hitler en personne. Alors que ce dernier est sur le point de se suicider dans un bunker à Berlin, l'attaque ultime consiste à envoyer un avion, appelé le Silbervogel, lâcher une bombe atomique sur New-York. La bombe...
Mais l'installation de la balise ne se déroule pas comme prévu : le signal se perd, et cette opération coûte de nombreuses vies. A présent, seul un pilote pourra conduire le Silbervogel vers son sinistre destin. Et c'est n'est nulle autre que la Flugkapitän Hanna Reitsch qui est la mieux placée pour remplir cette mortelle mission...
De son côté, Werner ouvre de plus en plus les yeux sur ce qu'est le nazisme, alors que la rumeur de la solution finale parvient à ses oreilles, au fur et à mesure que des camps de la mort sont libérés, repris bien souvent par les Russes. Werner se souvient de son enfance, avec le juif Max et la jeune Hanna, justement. Il se souvient de son amie, amoureuse de Max mais ne pouvant s'y résigner, car il était juif. Il se souvient de l'embrigadement de la jeune fille, de sa fascination devant la lecture de Mein Kampf, qui a vite pris le pas sur Les trois mousquetaires...
A présent, Werner sait ce qu'il aura à faire pour empêcher Hanna de commettre l'irréparable. Et cela ne pourra pas passer par des mots d'amour...
Ce cinquième tome de Dent d'ours est encore une fois bouleversant de justesse. Yann et Alain Henriet situent leurs personnages à la toute fin de la seconde guerre mondiale, là où seuls les Nazis les plus convaincus sèment encore la mort et la détresse autour d'eux. Et le fait qu'Hanna se retrouve dans cette idéologie, tout en paraissant une belle et frêle jeune femme, a quelque chose de troublant, voire de profondément dérangeant. Une superbe idée en tout cas, qui rend ce personnage particulièrement intéressant.
Car au milieu des alliances et des nouvelles règles du jeu (avec des Polonais qui refusent que les Russes s'emparent de la technologie allemande, par exemple), c'est bien le personnage d'Hanna qui est central dans ce tome : la jeune femme est profondément marquée par le nazisme depuis toujours, et pour autant le doute commence à s'instaurer dans son esprit, même si cela se fait bien moins vite que chez Werner.
Les dessins d'Alain Henriet sont encore une fois de toute beauté : c'est détaillé, avec une attention toute particulière sur les décors, les avions, les uniformes ; tout est extrêmement documenté, et la partie graphique sert parfaitement le scénario. Les crayonnés présents en fin de tome dans la première édition sont de toute beauté et, même si les couleurs d'Usagi sont parfaites, on se dit qu'une intégrale en noir et blanc de cette série serait tout de même une bien belle idée.
Rien n'est à jeter dans cette série où les petites histoires de la vie de quelques êtres se mêlent de très belle façon à la grande Histoire : à découvrir d'urgence pour celles et ceux qui seraient passés à côté jusque là !