Les Chroniques de l'Imaginaire

Le prisonnier écossais (Outlander - Lord John Grey - 4) - Gabaldon, Diana

Jamie Fraser, Écossais ayant soutenu le soulèvement jacobite en faveur du Bonnie Prince Charlie, est en liberté conditionnelle en Angleterre. Il peine à trouver la paix : la disparition de sa femme Claire, survenue plusieurs années auparavant, le tourmente toujours et il doit faire face à la culpabilité d'avoir cédé à la séduction de la fille de son geôlier, morte en donnant naissance à son fils. Alors qu'il commence enfin à nouer des liens avec l'enfant, son vieil ami Quinn cherche à le rallier de nouveau à la cause jacobite.
Pendant ce temps-là, à Londres, les frères Grey, à l'origine de la libération conditionnelle de Fraser, projettent de traîner un militaire véreux, Silverly, devant la justice, mais ce dernier s'est réfugié en Irlande. À contrecœur, le frère cadet, John, décide d'emmener Jamie Fraser dans son périple irlandais afin de disposer de ses connaissances en langues gaéliques et de sa force physique. Cette obligation n'est pas du goût de Fraser non plus mais il n'a pas le choix.

La série de romans Outlander met en scène les aventures de Claire, une femme du XXe siècle plongée dans l'Europe du XVIIe siècle. Le prisonnier écossais fait partie d'une série dérivée d'Outlander qui se concentre sur les aventures de Jamie Fraser, le mari de Claire, et de John Grey pendant les retours de Claire dans son époque d'origine. Tous les romans de cette série peuvent se lire de manière indépendante, même s'il est conseillé d'avoir lu le troisième tome de la série mère afin de mieux en comprendre toutes les ramifications.

Débutons par un point négatif, puisqu'il apparaît dès les premières lignes de l'ouvrage : les scènes érotiques gratuites, qui font peu avancer l'intrigue ou la caractérisation des personnages. On aurait pu imaginer une manière plus touchante de montrer que la femme de Jamie lui manque que par une scène de masturbation en incipit, d'autant que la dite femme n'est que peu mentionnée dans le récit. Il en ressort l'impression d'entamer un livre mal écrit, ce qui n'est pas du tout le cas. Il existe de grandes chances que les lecteurs de cet opus soient familiers de la série, ceux-là sauront passer outre. Pour ceux découvrant l'univers de Diana Gabaldon avec ce livre, ne vous arrêtez pas-là, persévérez !

Si l'on fait abstraction de ces rares passages mal à propos, Le prisonnier écossais réunit les ingrédients d'un bon roman. Plusieurs s'entremêlent, tous plus intéressants les uns que les autres et chacun contribue à approfondir l'univers : les espions jacobites, le militaire tortionnaire, la rivalité familiale entre les Grey et les Twelvetrees. On oscille entre roman historique, d'aventure, d'espionnage et policier entre Londres, ses parcs, théâtres de marionnettes, manoirs et clubs masculins, et l'Irlande, ses tourbières, châteaux emplis de courants d'air et monastères isolés. Les annexes en fin d'ouvrage témoignent de l'attention portée aux détails.

Diana Gabaldon soigne également la psychologie de ses deux personnages principaux, Jamie Fraser et John Grey, que le narrateur suit tour à tour. La nature de leur relation, leurs réserves l'un envers l'autre, sonnent vraies. À côté de ces deux protagonistes au caractère travaillé, les personnes secondaires surprennent. Eux, qui auraient pu être éclipsés, sont tout aussi mémorables, de Quinn au valet de chambre Tom Byrd en passant par Hal Grey ou sa femme Minnie. On sent qu'ils ont tous leur place dans cet univers et que chacun pourrait faire l'objet d'un ouvrage à part entière.

Exception faite des passages trop crus, le style de Diana Gabaldon est plaisant. Tour à tour descriptif ou introspectif, il sait se faire plus incisif et rapide lors des scènes d'action. Il ne manque pas non plus d'humour, surtout grâce au personnage de Lord Grey qui porte un regard sarcastique sur son environnement. Ce roman m'a davantage séduite que le premier tome de la série Outlander. L'absence de rappel au XXe siècle facilite l'immersion et le personnage de John Grey m'a plus intéressée que Claire. Je peux comprendre pourquoi il possède son propre fan-club. On sent aussi que l'auteure a davantage d'expérience et s'amuse peut-être davantage.