Nous sommes en 2132 et l'Humanité a maintenant bien du mal à survivre sur sa planète Terre d'origine. Il devient urgent de s'expatrier et en cela la planète Mars représente un espoir de poids, à la condition bien entendu qu'elle devienne habitable pour l'Homme. Et c'est bien là un enjeu colossal : sous la responsabilité de quelques nantis, et avec l'accord de la quasi-totalité des gouvernements planétaires, il a été décidé que les prisonniers sur Terre feraient de la main d'oeuvre gratuite pour accélérer la colonisation de la planète rouge, notamment en y faisant pousser des arbres génétiquement modifiés...
C'est ainsi que l'on retrouve Jasmine Stenford à son arrivée sur Mars, après un voyage de six mois. Jasmine se voit implanter un système qui lui permettra de respirer sur Mars, comme la totalité des autres prisonniers. Leur destination est la même et sans surprise : ils vont rejoindre le plus grand camp de travail jamais construit dans le système solaire, afin d'y travailler comme des forçats...
Alors, Jasmine se fait expliquer le règlement, avec les autres prisonniers en provenance de la Terre. Ici, il n'est pas question d'évoquer le passé et la raison du voyage sur Mars, au grand désespoir de Jasmine. Non... Ici, il sera question de survie, avec des journées épuisantes, qui n'en finiront pas. Seule une douche collective hebdomadaire représente un moment agréable à vivre. Une espèce de récréation que tous les travailleurs attendent avec impatience...
Pourtant, Jasmine a des secrets, elle aussi. Elle pense ne rien avoir à faire là, et pour cause... Jasmine est une ancienne policière sur Terre, et elle a eu le tort de se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment... De quoi se dire qu'il est injuste qu'elle ait maintenant à se défendre contre des compagnons de travail qui étaient d'anciens violeurs... Et de quoi se dire que ce système n'est sans doute pas si intègre que cela...
C'est Sylvain Runberg, à qui l'on doit déjà les excellents cycles d'Orbital, qui est au scénario de On Mars, une série qui sera un triptyque, et qui paraît aux éditions Daniel Maghen. Et c'est Grun (à qui on doit l'excellente série Metronom', avec Eric Corbeyran) qui assure la partie graphique, pour notre plus grand plaisir.
La première chose qui frappe avec ce premier tome, outre la très jolie couverture, est la qualité des dessins. C'est beau, détaillé, chichement coloré, et de plus enrichi d'un très beau cahier de croquis dans la première édition. Sur la forme, on tient là un livre absolument superbe, ce qu'on a d'ailleurs l'habitude de voir dans les rares productions éditées par la galerie Daniel Maghen.
Et puis, il y a le récit, qui confirme tout le bien que l'on pense d'emblée de cet album : on est dans de la science-fiction pure et dure, menée de main de maître par des auteurs qui en ont une certaine habitude, au vu des séries citées plus haut. Sylvain Runberg présente un futur sombre d'un point de vue écologique pour notre planète, et il n'hésite pas à donner de la profondeur et une certaine complexité, avec un gouvernement chinois qui commence à être contre le fait d'envoyer de la main d'oeuvre gratuite dans cet esclavage des temps futurs. Ainsi, le complot politique et médiatique est proche...
Difficile de ne pas éprouver de l'empathie pour Jasmine, le personnage principal, même si cette dernière ne fait pas dans la fragilité. Les auteurs ont le bon goût de nous en dévoiler un peu plus sur son passé, dans des flashbacks parfaitement amenés, signes encore une fois d'une belle maîtrise scénaristique. Les dessins de Grun sont à l'avenant, parfaitement au service de cette histoire, même si d'aucuns pourraient reprocher un côté figé, qui est le pendant d'un tel niveau de détails. Toujours est-il que chaque case respire les heures de travail, avec des expressions travaillées, des cadrages osés et des décors faisant l'objet du plus grand soin.
Ce premier tome de On Mars est une franche réussite que l'on ne peut que posséder, notamment si on aime la science-fiction. Il pose les bases d'un univers solide et cohérent, dans un univers que l'on pourrait qualifier aussi de carcéral. Il me tarde d'en découvrir les développements dans les tomes suivants !