La sexualité masculine... Voilà un thème qui n'est pas si fréquemment abordé. On ne parle pas là des bimbos que l'on voit partout, ou des scènes pornographiques qui ne sont pas beaucoup plus difficiles à trouver de nos jours, mais bien de l'intimité d'un homme, et ce à partir de ses premiers émois. C'est en tout cas ce qu'a voulu nous raconter JeanLouis Tripp, l'auteur de Magasin Général (avec Régis Loisel au dessin) dans ce Extases, qui paraît chez Casterman. Un récit autobiographique au possible.
Et Dieu sait que sortir un tel livre n'a pas forcément été quelque chose de simple. Sans mauvais jeu de mot, il y a tout de même une sacrée prise de risque ici, une mise à nu que l'on ne pourra que saluer, surtout après avoir lu ce premier tome...
Ainsi, on retrouve le jeune Jean-Louis (oui, c'est autobiographique, mais uniquement en ce qui concerne le personnage de JeanLouis Tripp...) en pleine école primaire, alors qu'une jolie jeune fille fait son apparition dans sa vie. Mais cette dernière ne sera là que pour quatre mois, avant de suivre son gendarme de père en Australie, à l'autre bout de la planète. Il s'agit là du premier souvenir de Jean-Louis, que cette séparation a rendu bien triste, alors même que rien ne s'était passé avec cette fille...
Et puis, les années collège arrivent, avec des discussions exacerbées entre copains, autour de ce qui se cache sous les jupes des filles, comme le chantait un certain Alain Souchon... Et là, autant dire que tous les garçons sont dans l'erreur la plus absolue, même ceux qui ont l'air de tout savoir... C'est grâce à une fille plus ouverte, plus facile comme on dit, que Jean-Louis aura vite une idée un peu plus précise de tout cela...
Et puis, il y a Caroline, la vraie première petite amie de Jean-Louis. Celle avec laquelle il va tout, mais alors absolument tout découvrir, après les plaisirs solitaires. Caroline est dans la même classe que lui, elle est mignonne, et c'est un amour adolescent fou, torride, qui se met en place, dans la certitude qu'il durera à vie.
Les semaines et les mois passent, dans une torpeur torride, et, peu à peu, Jean-Louis souhaite tenter de nouvelles expériences. Un petit diable n'a de cesse de lui apparaître : pourquoi donc passer toute sa vie avec une seule fille, au vu de tout ce qui passe à sa portée ? Voilà de quoi s'interroger. Et, au passage, est-ce-que c'est tromper, en ayant une aventure homosexuelle ?
JeanLouis Tripp se livre véritablement à livre ouvert dans ce livre. Certes, cela parle de sexe, mais d'une manière intime, complètement ouverte, comme il ne m'a jamais été donné de lire dans une bande dessinée, en tout cas ! Comme je le disais plus haut, on est bien loin de ce que peuvent produire des gens comme Serpieri, ou encore Milo Manara. Ici, on suit le jeune Jean-Louis depuis ses tout premiers films, et jusqu'à des choses bien plus inavouables, alors qu'il est étudiant !
Les dessins de JeanLouis Tripp servent parfaitement cette histoire. C'est en noir et blanc, et cela en renforce efficacement le côté brut de fonderie. Suivre ce jeune Jean-Louis est un vrai plaisir et on ne pourra que se prendre d'empathie pour le personnage, ou au moins pour une partie de ce morceau de vie ! N'importe quel garçon y retrouvera certainement un petit morceau de son passé, et avec plaisir et humour, qui plus est !
C'est raconté de façon fraîche, légère, et la prise de recul est immédiate pour le lecteur. Cela en devient jouissif, et il faut reconnaître qu'il est difficile de lâcher ce livre avant son terme, et ce malgré le nombre de pages bien supérieur à une bande dessinée classique. C'est bien là le signe que le pari est vraiment une franche réussite : on rit, on pleure et on s'émoustille à la lecture de ce premier tome. Vivement, mais alors vivement la suite, JeanLouis Tripp !
