Les Chroniques de l'Imaginaire

Maisons Hantées - Collectif

Comme la plupart des recueils, quelques unes de ces dix-sept nouvelles vous envoûteront plus que d'autres. Certaines sont rondement menées comme Préservons l'éternelle fontaine, Kolka, 145 rue Lafayette, Cambrousse Punk ou encore La Vénus aux Epines, d'autres m'ont moins séduite comme Motel K ou encore Le Murmure des Pierres. Toutes traitent de lieux hantés. J'apprécie particulièrement les histoires mettant en scène des lieux hantés pour ce qu'elles regorgent de mystères, de drames à demi-avoués, de monstres un peu poussiéreux. Les histoires horrifiques sont dans ce recueil souvent associées à l'idée d'une perversité ou du moins d'une certaine transgression. Ceci est un peu regrettable à mes yeux. Peut-être qu'un dialogue comme « retire ta culotte » horrifierait mon arrière-grand-mère, décédée dans les années 1960, je ne sais pas... Pour moi, cela ne constitue pas l'essence de l'histoire horrifique. Ce n'est pas le caractère cru d'une histoire qui présume de sa qualité en tant qu'histoire d'horreur mais la part d'indicible justement. Ceci explique mes réticences sur Motel K par exemple. Heureusement, l'ordre des nouvelles offre une alternance de styles et de situations très bien pensée et nous fait vite oublier les quelques histoires moins appréciées.

La plupart des nouvelles sont illustrées selon un style qui varie aussi. Nul doute que vous trouverez, à l'image de votre nouvelle, votre illustration préférée. Et maintenant, petit tour des histoires en présence !

Jeux d'enfants, de Florine Soulas
Un jeune homme revient dans la maison abandonnée où il avait l'habitude de jouer quand il était enfant.
L'idée de départ est intéressante, même si je me suis sentie perdue quant au nombre de personnages auquel nous avons à faire..

Motel K, de Yann Isoardi
Un homme se confie à un psychiatre.
Ce fut loin d'être ma nouvelle préférée. Je n'ai pas apprécié le style d'écriture ou les événements. (Je ne peux pas en dire beaucoup plus sans spoiler... inconvénient des nouvelles).

Annabelle, de Jean-Charles Flamion
Un spectre hante la salle de bains d'une jeune femme et remet en question son orientation sexuelle.
Cette nouvelle n'est pas à proprement parler horrifique mais le dénouement est plus qu'inattendu et suscite un certain malaise.

Le Murmure des Pierres, de Chris Vilhelm
Un jeune homme récemment sorti d'un hôpital psychiatrique retourne dans son manoir familial après des années d'absence.
J'apprécie habituellement ces nouvelles mêlant folie et vieilles pierres. Celle-ci ne m'a pas semblé suffisamment différente de ce que j'avais pu lire en la matière pour m'enthousiasmer mais elle n'en demeure pas moins efficace. 

Préservons l'éternelle fontaine, de Raphaël Boudin
Un manifeste pour la protection des demeures hantées.
Voilà une nouvelle qui prête à sourire. Le texte est très informatif, quasi scientifique et assorti de quelques photos (dont – spoiler – celle d'une vache !). Si l'horreur ne nous prend pas à la gorge en la lisant, cette nouvelle nous permet de passer un bon moment le temps de quelques pages. Elle offre un contraste plutôt heureux avec la nouvelle précédente.. et celle à suivre.

Amphytryon, de Quentin Fourreau
Une vieille abbaye normande est hantée par son passé. En échange de son exorcisme, elle offre l'occasion à une jeune SDF séropositive de se venger de son ancien petit ami.
Je suis plutôt mitigée au sujet de cette nouvelle. J'aime l'idée d'une demeure possédant son esprit propre mais j'ai moins apprécié l'évocation (certes sans détails !) de scènes de viols sur des enfants. On pourrait me rétorquer que c'est de l'horreur... et ce serait tout à fait vrai, mais c'est davantage le dégoût qui m'étreint quand je lis ce genre de choses.

65 de la rue Bouscarrat, de Jérémy Bouquin
Une jeune femme, adepte du street art, se rend dans un ancien bordel pour y réaliser des graffitis.
Cette nouvelle aurait selon moi pu être plus forte si elle n'avait pas développé certains passages sur un autre personnage, qui rendent la conclusion un peu confuse. Le personnage principal semble moins crédible en jeune femme branchée des années 2010 et plus à sa place dans les années 90. La nouvelle n'en demeure pas moins captivante.

Kolka, de V.F.F. Pouget
Un couple de touristes français, accompagné de leur jeune nièce, se rend en Islande pour les vacances mais se perd dans la brume.
Une de mes nouvelles préférées. Le style est fluide, les personnages crédibles et l'histoire, quoique prévisible, laisse place à l'imagination grâce à une fin ouverte.

145 rue Lafayette, d'Antoine Techenet
Deux explorateurs urbains croient dénicher le gros lot dans une demeure haussmannienne parfaitement conservée.
Une autre de mes nouvelles préférées. Le rythme est parfaitement maîtrisé, le style agréable. Les personnages, bien que peu détaillés, réussissent à susciter l'empathie.

Classifié, d'Emmanuel Delporte
Une jeune femme est retrouvée démembrée dans un tunnel de la petite couronne, la police mène l'enquête.
Le changement de style est bienvenu : la nouvelle, après un prologue mettant en scène la victime, se base sur les documents judiciaires contenus dans son dossier. Il s'agit sans doute de la nouvelle la moins « centrée » sur une maison hantée mais qui reste toutefois effrayante.

Métafiction, de Mahaut Davenel
Une femme est séquestrée par son libraire.
L'idée de cette nouvelle est intéressante, son traitement l'est un peu moins mais est tout de même rafraîchissant.

Dans le placard, de Hélène Duc
Une petite fille attend le retour de son père.
Il est toujours périlleux de faire de son narrateur un enfant et de reproduire le style parlé dans le récit. À ce titre, cette nouvelle s'en tire bien même si l'histoire peine à décoller.

Cambrousse Punk, de Mickaël Freugray
Un punk SDF hérite de la maison de sa défunte tante et décide de s'y installer.
J'ai au départ été quelque peu lassée de « retomber » sur un héros SDF dans un recueil déjà rempli d'arpenteurs urbains en tous genres. Celui-là est cependant bien différent : il possède une sacrée dose d'humour. On s'amuse énormément dans cette nouvelle narrée par ce punk sans langue de bois.

Iravel, de Vincent Tassy
Un couple de nobles vit un amour platonique, au grand désespoir de l'homme contraint à se soulager tout seul en pensant à sa belle.
À la différence de la nouvelle précédente, ce récit est d'un niveau d'écriture très recherché. Trop peut-être. Il vise sans doute à reproduire ici le style des nouvelles gothiques..

Les Murs de Blackat, de Nicolas Saintier
Un couple s'installe dans un nouveau manoir en Écosse ; la jeune femme ne tarde pas à y ressentir une présence.
Cette nouvelle se lit assez facilement. On devine cependant vite la nature de sa conclusion.

La Vénus aux Epines, de David Mons
Un jeune étudiant découvre une demeure anglo-normande dont toutes les surfaces en bois sont couvertes d'épines et transmettent à qui les touche un étrange SOS.
Une nouvelle bien menée et que j'ai appréciée.

Dehors il neige, de Bruno Pochesci
Un homme grandement brûlé sent la mort approcher.
Une nouvelle apocalyptique qui ne m'a pas entièrement convaincue, en partie parce que je ne m'attendais pas à en trouver une sur ce thème dans un recueil de ce type.