Les Chroniques de l'Imaginaire

Epiphania (Epiphania - 1) - Debeurme, Ludovic

Jeanne et David sont un couple depuis plusieurs années et, à présent, des dissensions ont lieu. Et pour cause... Alors que Jeanne est désireuse de devenir maman depuis quelques temps, cette idée angoisse terriblement David, qui en fait régulièrement des cauchemars étranges... Peut-être que l'idée fait son chemin chez ce guitariste talentueux, qui finit par accepter une thérapie de groupe avec Jeanne et d'autres couples, sur une île au cadre pour le moins paradisiaque...

Mais le stage vire très rapidement au cauchemar, lors de la première nuit que tous ces couples passent sur l'île. D'abord, cela commence par trois immenses météorites qui s'abattent sur le continent, non loin de l'île... Et puis, c'est un véritable raz-de-marée qui s'abat sur la région, laissant uniquement David pour vivant, ainsi que l'organisateur du stage... Les deux hommes en question parviennent à regagner le continent, sur une embarcation de fortune, et ils sont frappés de trouver ces étranges pierres qui jonchent le sol...

Et rapidement, David se rend compte, avec bien d'autres contemporains, que les pierres en question n'en sont nullement... La télévision en parle : il s'agit de crânes d'êtres vivants en développement dans la terre, qui se sont retrouvés là, par millions : les enlever de la terre où ils se développent, c'est les tuer, ni plus ni moins. Il se dit même que certains d'entre eux ont maintenant des yeux qui sont visibles. Des yeux qui s'apparentent à ceux d'un enfant, qui vous regarde.

Alors, David finit par déterrer l'être qui est dans son jardin. Il se retrouve ici avec un être qui ressemble à un enfant, si ce n'est qu'il a des pattes de faune. Le phénomène est incroyable, car il touche des millions de foyers : les enfants venus d'on ne sait encore où ont tous une ressemblance avec un animal. Pour David, c'est un faune. Et David, rapidement, se prend d'une paternité incroyable avec cet enfant qu'il n'a finalement jamais pu avoir avec Jeanne...

Ainsi, David accompagne, quelques temps plus tard, le mixbody (c'est comme ça que les humains normaux les appellent...) lors de sa première rentrée scolaire. Et rapidement, David se rend compte des différences qui seront faites entre les humains et les mixbodies... Rapidement, tout est prétexte à faire une différence avec ces phénomènes, tandis que les hypothèses les plus folles sont formulées, par rapport à leurs origines. David le sait désormais : entre humains et mixbodies, vivre ensemble ne sera pas simple...

Ludovic Debeurme (Un père vertueux, Trois fils ou encore Terra Maxima, tous chez l'éditeur Cornélius) nous régale avec le premier tome de ce qui sera un triptyque. Epiphania est une série à la lecture parfaitement fluide, au rythme d'enfer : en tant que lecteur, il sera bien difficile de lâcher le tome avant sa terrible fin. Ce sont donc les éditions Casterman qui éditent ce premier tome aux dessins épurés.

Ainsi, il faut reconnaître que Ludovic Debeurme est un auteur qui a une patte graphique bien à lui, ce qui est en soi une excellente chose dans le neuvième art. C'est épuré, laissant une grande place à la lisibilité, les cadrages sont souvent audacieux et parfaitement trouvés, et le découpage reste parfaitement adapté au rythme narratif que l'auteur s'impose lui-même, en tant que scénariste, dessinateur et coloriste, tout à la fois. Les planches sont vivement colorées, donnant un côté pulp rétro parfaitement bienvenu.

Bien entendu, des thèmes forts sont mis en avant ici, entre l'écologie (et les catastrophe climatiques qui font la une des journaux en ce moment...) et le racisme. Pas facile de vivre ensemble entre humains, alors imaginez avec des êtres que d'aucuns qualifient d'extraterrestres. De quoi se rappeler un film comme District 9, par certains côtés.

Tous ces thèmes sont en tout cas admirablement traités, avec humour parfois, désespoir souvent, et en tout cas avec beaucoup d'intelligence. Un premier tome prometteur, très réussi et accrocheur, mettant en scène des personnages vraiment attachants : vite, la suite !