New Terra ou Ilus. Peu importe le nom, c'est la première planète de l'autre côté de la porte à être colonisée. Par des réfugiés ceinturiens de Ganymède, qui voient d'un mauvais oeil la décision des Nations Unies d'attribuer à l'entreprise RCE l'exploitation scientifique de ce nouveau caillou spatial.
RCE approche en nombre mais sans intention ouvertement hostile. Le comité d'accueil est, disons, explosif. La plateforme d'atterrissage vole en éclats, la navette de débarquement avec. Parmi les passagers tués, un paquet de scientifiques et le gouverneur provisoire nommé par les Nations Unies. New Terra démarre mal.
L'ONU et l'APE décident alors d'envoyer un troisième parti pour calmer le jeu et entamer des négociations entre la RCE et les premiers arrivants. Ils espèrent éviter un massacre.
Bon... ils choisissent Jim Holden.
Même lui sait que ce n'est pas une bonne idée. Enfin, au début...
Après la calamiteuse Porte d'Abaddon, je n'attendais rien de ce quatrième épisode de The expanse. Ma seule espérance était que Les feux de Cibola ne soient pas trop irritants.
Je ne suis pas déçu. La qualité du récit est toujours, au mieux, passable. Pour Les feux de Cibola (titre, soit beaucoup trop recherché, soit déterminé au hasard), les auteurs ont décidé de restreindre leur univers à une seule planète : New Terra ou Ilus selon que vous arrivez dessus ou que vous y êtes déjà installé. On entre dans un mélange de genres plutôt SF, action et aventure. Comme d'habitude, Corey nous chauffe en laissant planer beaucoup de choses : une partie exploration, une grande menace alien et le développement de la colonisation en-dehors du système solaire.
Mais non, en fait. On a droit à une petite enquête. L'exploration, les auteurs l'ont oubliée jusqu'à ce que l'environnement se transforme (pour quelques pages) en récit catastrophe. D'ailleurs, qui a dit que l'histoire se passait sur une planète bien éloignée de la terre ? Ça pourrait très bien être le nord de la France ou la Sibérie. Si vous vous attendiez à voir ou comprendre la colonie se développer et que l'économie et la négociation entre les trois partis vous semblent de bons thèmes pour ce roman, ce n'est pas le cas de Corey. Realpolitik, quelqu'un peu lui expliquer ?
La menace alien en fond ? Elle ne vous fera pas plus peur que le père Fouettard, même si elle lance ses limaces tueuses.
Il y a un peu d'action et d'aventure, c'est vrai, mais rien qui arrivera à faire décoller la tension dramatique. Elle est plate. Les feux de Cibola crépitent à peine. Qu'y a-t-il d'autre dans cette brique ?
Une narration chapitrée par personnages qui, hormis Holden, sont des nouveaux par rapport aux tomes précédents. L'apparition éphémère de Bobbie en introduction ? Elle laisse présager un bon début mais elle ressemble plus à du fan service qu'à autre chose.
Puis, on passe à l'insupportable Holden (pas de bol, il n'a pas encore grillé dans un soleil). Suivent Havelock, le second de la sécurité de la RCE, qui ressemble à un copier-coller de n'importe quel personnage qui bosse dans la protection des personnes et des biens, qui n'aime pas son chef ni prendre des initiatives, et Basia, qui a du potentiel en tant que terroriste repenti mais qui n'est, au final, qu'un synopsis étalé sur trop de pages.
Comparé aux autres, le dernier personnage, Elvi, est un phénomène. Elle est biologiste et a survécu à l'attentat initial. Elle est l'archétype de ce que Corey sait faire de pire dans la construction de personnage : agaçante, idiote, naïve comme une adolescente sortie d'un roman rose du début du XXème siècle. Je ne comprends pas que l'éditeur ait laissé passer cela.
Enfin, il y a les personnages secondaires. Si l'équipage du Rossi' est composé de PNJ, il y a Murtry (ça claque comme nom), le chef de la sécurité de la firme RCE. Je n'ai pas pu m'empêcher d'avoir comme image mentale de cet acteur, Bennett, le méchant (bien méchant) du film Commando - avec la moustache bien sûr. Ce personnage colle à fond aux standards du bad guy de film d'action des années quatre-vingt.Il reste encore un personnage surprise, qui a droit à quelques courts chapitres. Heureusement.
A part ça ? L'environnement restreint à une planète donne un côté moins prétentieux à l'écriture des auteurs et facilite la lecture. Je les en remercie car le bouquin se laisse, étonnamment, lire avec aisance. Plus étrange encore, l'intrigue est tellement simple qu'elle en devient divertissante.
Mais j'ai vraiment du mal à comprendre le succès de cette série et les bons retours généraux sur la toile. C'est mal écrit, mal dégrossi, les dialogues n'ont aucune saveur, le vocabulaire est pauvre, il y a sans arrêt des répétitions (on a compris qu'Alex parle comme un Texan de Mars), le suspense vole au ras des pâquerettes et il faut presque se faire du mal pour apprécier les acteurs de ce space opera qui tient plus du scénario de jeu de rôle bouclé en cinq minutes que de la fresque dramatique et palpitante.
Je parlais de Commando quelques paragraphes plus haut. Finalement, je pense qu'on peut comparer Les feux de Cibola à un bête film d'action des années quatre-vingt. Le genre de truc qui passe l'après-midi à la télé et qui fait passer une gueule de bois. On l'aura oublié dans l'heure qui suit et c'est sans doute mieux comme ça.